L'Occident a dominé le monde de la fin du XVe au début du XXIe siècle, exportant sa puissance, ses institutions, ses modes de production et ses idées sur tous les continents à travers trois mouvements de mondialisation : les grandes découvertes du XVIe siècle ; la colonisation au XIXe siècle ; l'effondrement de l'empire soviétique et l'universalisation du capitalisme à la fin du XXe siècle. Cette troisième mondialisation semblait consacrer son triomphe. Mais l'Occident a cédé à la démesure, perdant le contrôle de l'ordre mondial, du capitalisme, de sa sécurité et de ses valeurs, minées par les populismes. Le XXIe siècle est ainsi placé sous le signe de l'histoire universelle mais aussi de la désoccidentalisation du monde.
La guerre d'Ukraine a acté la fragmentation du système international, ouvrant une nouvelle ère marquée par la divergence entre l'Orient et l'Occident. Vladimir Poutine a échoué dans son double objectif d'annihiler l'Ukraine et de faire la démonstration de la décadence de l'Occident. Il a soudé la nation ukrainienne, réarmé l'Allemagne, réveillé l'Union européenne, réengagé les États-Unis en Europe, ressuscité l'Otan. Mais il a aussi créé un fossé entre l'Orient et l'Occident qui rend très difficile toute coopération dans la gestion des risques planétaires, à commencer par la lutte contre le dérèglement climatique.
La divergence est d'abord démographique : si le vieillissement est partagé, l'Occident ne compte que 1,3 milliard de citoyens contre 3,6 milliards pour l'Orient. Sur le plan économique, la mondialisation reposait sur l'imbrication entre, d'une part, les États-Unis – réassureur ultime de la consommation mondiale – et la Chine – devenue l'atelier du monde au prix de la dévastation de l'environnement – et, d'autre part, l'Allemagne – superpuissance industrielle exportant vers le groupe Brésil-Russie-Inde-Chine-Afrique du Sud (Brics) – et la Russie, son fournisseur attitré de matières premières et d'énergie bon marché.
Découplage total
Tout cela a disparu et le découplage est total. Lors du XXe Congrès, Xi Jinping a développé sa vision d'une Chine transformée en forteresse face au reste du monde, entendant garantir son autosuffisance dans les secteurs stratégiques de la technologie, de la finance, de l'alimentation et de l'énergie, ce qui est incompatible avec la poursuite des exportations sur lesquelles repose sa croissance. L'économie russe se trouve isolée et engagée dans un grand bond en arrière à la suite des sanctions. L'Allemagne sombre dans le désarroi avec l'effondrement de son modèle mercantiliste. Les États-Unis voient leur économie renforcée par la guerre d'Ukraine, en raison de leur autonomie énergétique et de la puissance de leur technologie, de leur armement et de leur agriculture, mais ne parviennent pas à enrayer la situation de quasi-guerre civile qui mine leur démocratie. La priorité des nations et des entreprises ne va plus à l'intégration mais à la souveraineté, qui implique un désaccouplement logistique, commercial – avec les sanctions croisées –, technologique, monétaire et financier – avec la dédollarisation.
La rupture ne concerne pas seulement les intérêts mais les visions, les institutions et les valeurs. Développement intensif à l'ouest fondé sur la productivité des facteurs de production, la collecte de l'épargne mondiale, les services ; croissance extensive à l'est privilégiant la production de masse, la consommation des ressources naturelles et humaines, l'industrie et les infrastructures. Démocraties et individualisme radical à l'ouest ; empires autoritaires, primat de la société sur les personnes, contrôle par l'État des entreprises et des citoyens, normalisation culturelle à l'est. Volonté à l'ouest de construire un ordre mondial fondé sur des règles ; mobilisation à l'est autour de la destruction d'un système international jugé inféodé à l'Occident pour lui substituer, au nom de la multipolarité, des sphères d'influence fondées sur les purs rapports de force ainsi que le revendique le manifeste sino-russe du 4 février 2022.
Détacher les pays du Sud de l'Orient
Dans ce choc des civilisations, l'Orient bénéficie du renfort du Sud et de ses puissances émergentes – Inde, Brésil, Turquie, Iran, Arabie saoudite, Nigeria, Afrique du Sud –, qui partagent la haine de l'Occident et l'aversion pour l'ordre mondial créé en 1945. Le basculement vers un système éclaté, conflictuel et volatil ne leur paraît pas négatif dès lors qu'il leur permet de faire progresser leurs intérêts de manière opportuniste, à l'exemple de la Turquie de Recep Tayyip Erdogan. La Chine est devenue leur premier partenaire commercial et financier, à travers les nouvelles routes de la soie. La Russie bénéficie d'un préjugé favorable hérité des luttes de libération nationale. Longtemps enfoui, le ressentiment contre l'Occident, enraciné dans le passif colonial, joue désormais un rôle central dans le débat politique intérieur des émergents comme dans leur diplomatie. Et ce de manière paradoxale, au moment où la domination de l'Occident disparaît et où ses valeurs – la liberté, la raison, l'État de droit – sont contestées en son sein même.
La grande divergence entre l'Occident et l'Orient porte des risques de conflits majeurs, comme le prouve l'invasion de l'Ukraine, sous laquelle pointent la guerre hybride totale que la Russie a engagée contre l'Europe comme les menaces de la Chine sur Taïwan. La partition du système mondial interdit par ailleurs tout traitement concerté des risques systémiques, qu'ils soient financiers, sanitaires ou climatiques. La transition climatique heurte notamment de plein fouet le modèle oriental de développement extensif. Ainsi, au moment où le Giec prévoit entre 2030 et 2052 une hausse des températures de 1,5 °C par rapport à niveau préindustriel, au moment où les catastrophes se multiplient – des sécheresses aux inondations en passant par les incendies et les cyclones –, la Chine a annulé toute discussion climatique après la visite de Nancy Pelosi à Taïwan. La guerre d'Ukraine provoque un retour massif vers les énergies fossiles en Europe, où l'Allemagne produira en 2023 le tiers de son électricité à partir du charbon. Dès lors, la COP27, qui va s'ouvrir à Charm el-Cheikh, paraît mort-née, sans que les projets de « clubs climat » au sein des blocs, à l'exemple du G7, présentent une alternative crédible à l'approche multilatérale.
L'Occident doit rétablir une dissuasion militaire et technologique fiable pour endiguer l'expansion des empires autoritaires. Mais il lui faut simultanément entreprendre une stratégie de reglobalisation vis-à-vis des pays du Sud pour les détacher de l'Orient. Avec pour priorité la lutte contre le réchauffement climatique, dont ils sont les premières victimes.
Comment apprendre (ou réapprendre) à voir la vie en rose ? Comment retrouver le plaisir de jouir de l’instant ? Comment ne pas se l’interdire ? Souvent, nous nous interdisons de vivre aujourd’hui pour mieux espérer un hypothétique demain... D’où l'intérêt de lire les auteurs présentés dans ce hors-série.
Les célibataires sont majoritaires dans les nouvelles demandes permises par la PMA pour toutes. Qui sont-elles ? Et comment leur projet est-il accueilli ?
Manon* a 35 ans, elle est fonctionnaire de police dans le Val-de-Marne. Elle a une voix très douce, un peu timide. « J'ai mon emploi, mon appartement, ma voiture : matériellement, je ne manque de rien. » Manon s'est lancée seule dans un parcours de procréation médicalement assistée (PMA) dès que la loi l'a permis ; elle a bientôt rendez-vous pour une première insémination. Elle n'en a pas encore parlé à ses parents. Dans sa famille, dit-elle, on est « très traditionnel » : un bébé se conçoit à deux, et en couple hétérosexuel. Manon aurait bien voulu, d'ailleurs, devenir mère de cette façon. Pour un peu, elle s'excuserait de n'y être pas parvenue.
Elle a essayé de tomber enceinte il y a cinq ans, avec son compagnon de l'époque. On lui diagnostique alors une insuffisance ovarienne précoce, le couple entame un suivi à l'hôpital – ils se séparent après deux ans et demi d'essais infructueux, et le projet s'arrête là. « Après ça, raconte Manon, je crois que je me suis interdit de rencontrer quelqu'un. J'avais honte, je n'imaginais pas annoncer à un homme que j'avais ce type de problèmes. » Aller à l'étranger aurait coûté trop cher : elle a serré les dents, supporté tant bien que mal les « Toujours pas casée ? » de son entourage et les discours ambiants sur l'« égoïsme » d'une « PMA sans père ». Elle a attendu. « Le soir où la loi est enfin passée, j'ai fait un super apéro avec mes amis. » Le lendemain, elle rappelait le centre qui l'avait reçue lorsqu'elle était en couple.
Raz-de-marée
Depuis le 29 septembre 2021, la PMA est accessible, en France, aux femmes dites « non mariées », comme aux couples lesbiens. Des célibataires, il a été peu question durant l'examen du texte. Elles posent pourtant aux praticiens des questions singulières – l'absence d'un second parent, d'un « tiers séparateur » entre la mère et l'enfant, continue par exemple de préoccuper certains psychologues. Surtout, elles représentent plus de la moitié des 5 126 nouvelles patientes recensées au premier trimestre 2022 par l'Agence nationale de biomédecine. En six mois, de septembre 2021 à mars 2022, près de 13 000 demandes de don de sperme ont été enregistrées en France – environ dix fois plus qu'au cours de l'année 2019, où 987 enfants étaient nés grâce au don. Un raz-de-marée.
« Nous nous attendions à un effet de rattrapage, mais son ampleur nous a surpris, reconnaît Mikaël Agopiantz, responsable du service d'aide à la procréation de l'hôpital de Nancy. Chez nous, les demandes de PMA avec don de spermatozoïdes ont augmenté de 400 %. » Le CHU de Nancy s'est tenu prêt, cependant. Une première PMA a été réalisée deux mois seulement après la publication des décrets d'application, quand la moyenne nationale s'élève aujourd'hui à un an d'attente entre la prise de contact et le début des essais. « En la matière, la France est sur un mode préhistorique, elle n'est pas au niveau des standards internationaux », lâche Mikaël Agopiantz.
Beaucoup de femmes ne sont pas prêtes à attendre douze mois, en effet, certaines n'en ont pas le temps. En Belgique, en Espagne ou au Danemark, les premiers pays d'Europe auxquels les femmes seules ou les couples de femmes s'adressaient jusque-là, les médecins ont vu le nombre de Françaises en consultation diminuer après l'adoption de la loi… pour remonter quelques mois plus tard.
« Tout le monde est sur les genoux »
« Parler de “PMA pour toutes” tenait de l'affichage, commente avec une pointe d'agacement Catherine Guillemain, présidente de la fédération des Cecos (centres de conservation des œufs et du sperme). Il s'agit d'une prise en charge médicale : il ne suffit pas de la vouloir pour l'obtenir. Entrent en ligne de compte l'âge de la patiente, l'état de sa réserve ovarienne, la disponibilité des paillettes de spermatozoïdes… mais aussi les moyens techniques et humains. Quand la loi a été adoptée, nous estimions nécessaire la création de 100 à 120 postes sur le territoire. En juin dernier, 75 % d'entre eux n'étaient toujours pas pourvus. La réforme a été mise en place avec le personnel préexistant et, aujourd'hui, tout le monde est sur les genoux. »
Dans Le Monde, l'Agence nationale de biomédecine reconnaissait en août que « l'attente forte, mais souterraine » des femmes célibataires n'avait pas été suffisamment anticipée. « Les projections ont été faites en fonction des données récoltées à l'étranger sur la présence des Françaises en consultation, explique Bénédicte Blanchet, coprésidente de l'association Mam'en Solo, qui regroupe des mères célibataires. Tout un public est passé sous les radars. » Les femmes qui, comme Manon, comptaient sur une adoption rapide du texte français, et celles qui n'avaient pas les moyens d'être suivies à l'étranger, ou que l'illégalité de la démarche inquiétait. Certains chiffres européens auraient cependant pu attirer l'attention : au Danemark, ainsi, 1 870 femmes célibataires avaient eu recours à une aide à la procréation en 2019 (contre 470 couples de femmes). Et, selon une étude de l'University College de Londres en 2017, près de la moitié des Suédoises ayant recours à une PMA à l'étranger étaient des femmes seules.
Quadrature du cercle
Au centre de PMA de l'hôpital Tenon, à Paris, les femmes non mariées représentent près de deux tiers des nouvelles demandes. « On observe une très forte disparité entre les différents Cecos, remarque Nathalie Sermondade, qui y est médecin biologiste. Il est possible que ces demandes soient surreprésentées à Paris et dans les grandes villes. Mais il me semble que cela témoigne d'un bouleversement sociétal plus profond, d'un changement dans la conception même de ce qu'est une famille. »
« Il est intéressant de voir combien ces chiffres surprennent, commente de son côté Virginie Rio, présidente du collectif BAMP, qui informe sur les parcours de PMA. C'est assez révélateur du désir d'enfant des femmes et de leur désir d'autonomie, mais aussi de la difficulté à remettre en cause le modèle de la famille nucléaire. Un couple de femmes, c'est encore un couple… Mais une femme seule, vous n'y songez pas ! On a d'autant plus de mal à l'envisager que, pendant longtemps, il n'a été question dans le débat public que des familles monoparentales en souffrance, et en grande précarité. »
Certains Cecos rendent ainsi obligatoire un rendez-vous avec une assistante sociale – un régime dont les couples sont dispensés. Difficile de reconnaître la figure d'une mère célibataire, certes, mais ayant choisi de l'être. Non pas isolée, mais très entourée au contraire, et sans difficulté sociale ni économique particulière. Dans Si je veux (Grasset), qui retrace son propre parcours, la journaliste Johanna Luyssen décrit une forme de quadrature du cercle : « Ne pas faire “pauvre fille”. Ne pas faire “triste”. Ne pas faire “capricieuse”. Faire “sérieuse”, “déterminée” et surtout pas “anti-hommes”. »
« Je ne voulais plus attendre. Attendre quoi ? »
Marie est la mère d'un petit garçon de 15 mois né d'une fécondation in vitro au Danemark. Elle a 31 ans. « Ma dernière vraie vie de couple s'est terminée quand j'avais 23 ans, raconte-t-elle. Deux ans plus tard, j'ai découvert que je souffrais d'une endométriose susceptible de nuire à ma fertilité. J'ai acheté un appartement que j'ai retapé avec mon père, je sortais, je voyais du monde, mais je me sentais très seule, et je ne trouvais pas ma place. Ce diagnostic douloureux m'a finalement mis un coup de pied aux fesses. J'ai commencé à mettre de côté les articles que je trouvais sur la PMA, à me renseigner sur les différentes options. Le Covid a suivi et, à la sortie du premier confinement, j'ai décidé de me lancer. Je ne voulais plus attendre. Attendre quoi ? Je m'imagine tout à fait rencontrer quelqu'un un jour, et former une jolie famille recomposée. Je fais mes enfants, après on verra. » Marie a déjà pris rendez-vous avec sa clinique au Danemark, pour avoir un deuxième enfant du même donneur.
« La loi est venue légitimer une pratique qui a toujours existé de façon non officielle, et qui reste très difficile à quantifier », analyse Hélène Malmanche, sage-femme et docteure en anthropologie. Spécialiste du sujet, elle participe à une vaste étude lancée en 2021 par l'Institut national d'études démographiques (Ined), « AMP sans frontières ». « Ce qui est nouveau, poursuit-elle, c'est la façon dont les femmes assument aujourd'hui leur décision, et estiment que le couple n'est plus un préalable ni une condition pour fonder une famille. » « L'examen de la loi a permis de mettre sur la table des choses qui restaient taboues, abonde la sociologue Virginie Rozée, qui conduit l'enquête de l'Ined. Le fait notamment qu'un donneur n'est pas un père, que procréation et parentalité sont deux choses distinctes. Les choses avaient commencé de bouger avant la révision de la loi de bioéthique, et avant même le mariage pour tous : la société a admis progressivement que toute famille ne se fabriquait pas sous une couette, qu'il en existait d'autres formes – dont les enfants allaient très bien. Mais les femmes sont aujourd'hui mieux armées pour défendre leurs décisions. »
« Son choix n'est pas moins légitime que le mien »
De nouveaux profils apparaissent, les praticiens le confirment : aux femmes autour de 40 ans pour qui la PMA en célibataire est une forme de dernière chance, parfois de pis-aller, s'ajoutent désormais des patientes, parfois bien plus jeunes, qui décorrèlent d'emblée la vie parentale de la vie conjugale. Qui ne revendiquent pas de se débarrasser des mâles, non, et ne nourrissent aucune aigreur à leur endroit. Mais qui conçoivent leur vie amoureuse comme une aventure à part – capable aussi bien de rejoindre une vie de famille que de s'en éloigner, ou de la recomposer.
Certaines de ces femmes sont d'ailleurs en couple. Comme Christina, Montpelliéraine de 35 ans. Son compagnon et elle ne vivent pas ensemble, ce qui leur convient parfaitement. « Le confinement l'a confirmé : on est très bien chacun chez soi, raconte-t-elle. Mais c'est pendant le confinement aussi que la question de l'enfant s'est imposée à moi. Il y avait trois options : on le faisait ensemble, on se séparait si l'idée d'un bébé dans sa vie lui était insupportable… Ou je faisais un enfant de mon côté, mais avec son soutien. Il aura une place privilégiée, c'est certain. Mais je n'ai pas besoin qu'il soit ni géniteur ni parent – et je préfère avoir un enfant seule qu'avec un conjoint qui n'assume pas sa part dans l'éducation. » Christina a fait appel à Cryos, banque de sperme danoise, pour garantir à son futur enfant un accès au donneur – les paillettes sont livrées chez l'un des gynécologues recensés par la société, qui accepte (en toute illégalité) de pratiquer les inséminations à son cabinet.
Émilie, elle, habite en Champagne-Ardenne. Elle est passée par la Belgique avant d'entamer des démarches en France. Elle a 38 ans, elle est enseignante. Son compagnon a deux enfants d'une première relation et n'en souhaite pas de troisième. C'est donc seule elle aussi, et en expliquant aux services hospitaliers sa situation conjugale, qu'elle se lance dans le parcours. « Mes proches ont eu un peu de mal à comprendre la décision de mon conjoint, et moi-même j'ai pu avoir un peu de colère à son endroit lorsqu'une nouvelle tentative échouait, dit-elle. Mais je suis convaincue, au fond, que son choix à lui n'est pas moins légitime que le mien. »
« Ils ne veulent pas de moi ? Tant pis »
Ces profils nouveaux, les médecins ne savent pas toujours bien comment les accueillir. « Il s'agit non pas de patientes qui demandent une solution médicale à un problème d'infertilité, mais des femmes qui recherchent un accompagnement médicalisé pour un projet parental, explique Hélène Malmanche. On sort du champ de la pathologie et du traitement, c'est-à-dire aussi de la possible prouesse thérapeutique. Beaucoup de praticiennes et de praticiens sont très enthousiastes… mais d'autres y voient une forme de médecine de confort. Et la question est d'autant plus aiguë que les moyens humains manquent et que les centres sont débordés. »
À en croire les associations, certains centres de PMA refusent ou découragent ainsi les femmes de moins de 29 ans – l'âge minimal prévu pour une autoconservation des ovocytes dite « sociétale », c'est-à-dire en l'absence de raison médicale. « On m'a très clairement dit que j'étais trop jeune », raconte ainsi Natacha, 25 ans, aujourd'hui suivie en Espagne. Dès sa majorité, elle a fait en sorte de pouvoir réaliser ce projet-là : en mettant de l'argent de côté pour acheter au plus vite un appartement, en trouvant un emploi stable. Elle a vécu quelques histoires d'amour, rapidement affectées par ce désir d'enfant. « Je cherchais avant tout un futur père, dit-elle, ce n'est sans doute pas la meilleure façon d'entamer une relation. Je suis même assez convaincue que ce sera plus simple, après. »
Quand la loi a été adoptée, Natacha a pris contact avec le centre le plus proche de chez elle. « J'ai eu un premier rendez-vous avec une gynécologue qui, en l'espace d'une heure, a remis en cause toute ma vie sexuelle et affective. Qui m'a dit que je ne m'étais probablement pas “trouvée”, qui m'a demandé si j'étais sûre de n'être pas homo ou asexuelle. Et puis j'ai reçu un courrier me disant que mon parcours en France était terminé. Ils ne veulent pas de moi ? Tant pis. Et même tant mieux : en Espagne, c'est la clinique qui s'adapte à moi, à mes souhaits et à mes disponibilités, pas l'inverse, comme en France. »
Temporiser
Chaque centre dispose d'une relative autonomie, mais tout dossier passe devant une commission pluridisciplinaire, composée de gynécologues, de biologistes spécialistes de la fertilité et de psychologues. « Il nous arrive de temporiser un peu lorsqu'un projet ne nous semble pas assez abouti, ou que la situation nous paraît présenter des risques psychosociaux, explique Nathalie Sermondade. Mais nous avons pour principe d'accueillir tout le monde. » Cela, en respectant l'ordre d'arrivée des nouvelles patientes – sans opérer de tri en fonction de leur âge ou de leur situation conjugale.
Pauline, 38 ans, a préféré ne pas s'étendre sur sa situation. Elle n'a jamais éprouvé de désir pour qui que ce soit, homme ou femme. Elle l'a beaucoup caché à son entourage, se l'est beaucoup caché à elle-même – elle a essayé plusieurs fois de « se forcer », raconte-t-elle, mais toujours pour le pire. Elle a donc pris l'habitude de botter en touche lorsqu'on lui posait des questions, et contré de son mieux l'anxiété qu'elle éprouvait à l'idée de ne jamais trouver « le bon équilibre », de ne jamais non plus avoir d'enfant. « Cela fait très peu de temps que l'on parle ouvertement d'asexualité, dit-elle. Je ne connais ce mot-là, le mot qui me correspond, que depuis trois ou quatre ans. » Au centre de PMA de Nantes, où elle a pris rendez-vous en septembre 2021, elle s'est contentée de dire qu'elle était célibataire, de peur d'être traitée en bête curieuse et de voir sa demande retoquée.
Cheminement
« Ça m'a toujours semblé un peu curieux, commente Félicie, cette idée de valider ou non un projet d'enfant. Comment décider, et au nom de quoi ? Cela dit, les médecins espagnols ne posent absolument aucune autre question que biologique, et ça me paraît aussi un peu troublant. Il faudrait sans doute imaginer un juste milieu. » Félicie a 41 ans. Longtemps, dit-elle, elle a espéré construire un couple durable – elle n'imaginait pas être mère autrement. Elle a entamé une psychanalyse, pour essayer de comprendre pourquoi ses relations ne duraient pas, lutté elle aussi contre une forme de honte à échouer là où ses amis réussissaient. À 37 ans, elle a fait congeler ses ovocytes en acceptant d'en donner une partie – une procédure qu'autorisait la révision de 2011 de la loi de bioéthique. « C'était, à l'époque, une façon de me donner un peu de temps, au cas où je rencontrerais quelqu'un. »
Puis est venu ce jour où elle a cru être tombée enceinte, d'un amant avec qui elle n'envisageait pas de fonder une famille. « J'aurais dû être catastrophée, j'étais très heureuse. Et très déçue lorsque j'ai eu mes règles. Je me suis rendu compte, à ce moment-là, que le désir d'avoir un enfant était bien plus ancré en moi que je ne le pensais. » Il y a eu encore du chemin à parcourir, avant de se décider à contacter une clinique espagnole. De longues heures à lire des articles, écouter des podcasts, soupeser son choix. Félicie a d'abord pris contact, via une association, avec des hommes qui proposaient gracieusement leurs services pour des inséminations « naturelles » (au cours d'un rapport sexuel) ou « artisanales » (à l'aide d'une pipette). « J'en ai rencontré deux, assez sympathiques, d'ailleurs. Sauf que le premier m'a fait rapidement comprendre que je lui plaisais, et a plaidé assez lourdement pour une méthode “naturelle” dont je ne voulais pas. Et que le deuxième m'a fait la promotion de ses gènes exceptionnels en m'expliquant en long et en large que tout le monde dans sa famille était haut potentiel. Ça m'a nettement refroidie. Et je me suis dit, surtout, que je n'étais pas prête à prendre le risque de voir le géniteur changer d'avis et faire irruption dans nos vies. »
Ç'a été l'Espagne, donc, où elle est tombée enceinte à la troisième tentative : sa petite fille vient de naître. « J'ai eu le Covid presque en même temps : je me souviens très nettement m'être retrouvée, un peu hébétée, face à mes deux tests positifs. » Félicie avait également pris rendez-vous en France, au cas où. La première consultation a été fixée plus d'un an après son appel, en novembre prochain. Elle songe à s'y rendre malgré tout, son nourrisson sous le bras – dans l'éventualité d'une seconde grossesse.
3printemps 2021 ÉDITO La légende raconte que l’Ordre des Frères pontifes, une fraternité de laïcs et religieux du 13esiècle, s’était donné pour tâche de construire, d’entretenir et de protéger des ponts. Ils voulaient ainsi assurer un passage sécuritaire et gratuit aux pèlerins et favoriser les échanges entre des populations divi- sées par des cours d’eau infranchissables. Cespontifex(littéralement «faiseurs de ponts») médiévaux étaient à leur manière des artisans d’unité et de paix. Par leur art, ils étendaient des échanges limités par la nature. C’est en méditant sur ces moines constructeurs que notre équipe en est venue à mieux comprendre sa propre mission. Alors que notre monde souffre de plus en plus de fragmentation sociale et idéolo- gique, comment pouvons-nous converser avec tous sans nous sentir écartelés entre «croyants» et «non-croyants», entre «traditionalistes» et «progressistes»? Après tout, nul ne peut servir deux maitres à la fois. * Pour qu’un bateau puisse bien avancer, il ne doit tanguer pas plus à bâbord qu’à tri- bord. Ce complexe balancement est assuré par une quille profonde, une voile haute, un gouvernail précis et des passagers attentifs les uns aux autres. Comment atteindre ce délicat équilibre pour queLe Verbepuisse naviguer sur les flots tumultueux de l’océan médiatique? Où trouver cette juste ligne de flottaison sans chavirer dans la partisanerie, se saborder dans l’insignifiance ou couler dans la censure? Cette ligne ouverte et d’écoute, elle nous a été tracée par Lacordaire, qui a dit: «Je ne cherche pas à convaincre d’erreur mon adversaire, mais à m’unir à lui dans une vérité plus haute.» S’unir dans une vérité plus haute! Ce n’est pas tant la neutralité et encore moins l’uniformité que nous désirons, mais l’unité. Notre corps social et ecclésial disloqué ne sera rassemblé que par ses articu- lations.Le Verbedoit donc aussi faire office de conjonction de coordination! Notre mission consiste à construire des ponts entre des personnes qui sont séparées par des fleuves d’incompréhension et des rivières d’indifférence. Un pont est un LE NOUVEL ORDRE DES PONTIFES
4le-verbe.com chemin, mais un chemin qui permet d’aller au-delà de ce qu’on croyait possible. Que ce soit entre la société et l’Église, la foi et la culture, la gauche et la droite, ou entre Dieu et les hommes,Le Verbeveut édifier des ponts au service de la communion. C’est pourquoi, dans nos pages, vous trouverez des textes qui vous feront sentir chez vous et d’autres qui vous feront aller chez l’autre. Parfois, vous serez char- més, et d’autres fois étonnés, mais, nous l’espérons, jamais ennuyés. Nos paroles et nos témoins visent à susciter admiration, réflexion et conversion. C’est la vocation même de journaliste chrétien qui nous oblige à cette position, certes inconfortable, mais prophétique. * Voilà qui trace quelques traits de notre ligne éditoriale, qui ne se veut ni une ligne de fuite ni une ligne d’attaque, mais une ligne de crête qui pointe vers les cieux. Inspirée par Frédéric Ozanam, l’amoureux des pauvres et des lettres, cette ligne de transmission se résume en trois mots: vérité, beauté et bonté. La vérité de la raison et de la foi. La beauté de la langue et de l’image. La bonté des intentions et du ton. Ce triptyque métaphysique appelle à son tour trois attitudes théologales: intelli- gence, humilité et charité. L’intelligence du message. L’humilité du messager. La charité à l’endroit des interlocuteurs. C’est ainsi que nous espérons construire des ponts de toutes sortes: ponts-levis, sus- pendus, en arc, flottants ou tournants. Peu importe, pourvu qu’ils nous permettent de traverser les ravins de la mort et de soutenir cette culture de la rencontre et de la vie si chère au pape François et à ses prédécesseurs. Bâtir des ponts plutôt que polariser, voilà notre ligne de mire. Car notre monde a un urgent besoin d’un nouvel Ordre de pontifes. La rédaction Sophie Bouchard, James Langlois, Simon Lessard et Antoine Malenfant Un pont est un chemin, mais un chemin qui permet d’aller au-delà de ce qu’on croyait possible. Que ce soit entre la société et l’Église, la foi et la culture, la gauche et la droite, ou entre Dieu et les hommes,Le Verbeveut édifier des ponts au service de la communion.
printemps 20215
COURRIER MAGAZINE ET SITE WEB Unique, inspirant, irremplaçable Merci d’exister! Vous faites un travail de qualité, unique et inspiré! Irremplaçable! Qu’Il vous comble de grâces! Karine F. – Ile d’Orléans Témoignages «coup de poing» Merci pour vos articles intelligents qui font réfléchir et nourrissent mon appartenance au Christ. Le témoignage de Raphaëlle Gagné m’a beaucoup surprise, une confes- sion qui ramène la présence du Seigneur en force, une victime qui voit ses torts, très fort! «Coup de poing», on pourrait même dire. Merci encore! Marie D. – Saint-Julien Magnifique création Merci de nous préparer une revue intéressante qui célèbre la foi! Que le Seigneur puisse vous accompagner dans cette magnifique création. Nathalie P. – Sherbrooke Au sujet des photos de Klô Pelgag J’ai une impression de revenir à l’époque archaïque de nos premiers ancêtres, quand on les regarde avec les tatouages et autres désinvoltures. Peut-être suis-je périmé en rapport avec notre jeunesse? Merci pour l’en- semble de vos articles. Michel C. – Saint-Maurice Cher Michel, vous n’êtes surement pas périmé. Puisque Le Verbesouhaite bâtir des ponts entre les générations, entre très croyants et moins croyants, cela nous fait parfois découvrir des personnalités hautes en couleur... comme l’excentrique Klô Pelgag! Fils missionnaire C’est grâce à mon fils que j’ai entendu parler de vous. J’ai hâte de vous lire. Merci. La mission n’est pas un héritage... Ann-Stéphan F. – Gatineau C’est bien vrai, Ann-Stéphan, que la mission peut trans- cender les générations. L’héritage que nous avons reçu gratuitement, nous souhaitons le transmettre à notre tour gratuitement. En interaction avec la foi J’aimerais simplement communiquer à toute l’équipe à quel point j’apprécie le travail que vous faites dans vos entrevues et vos articles, autant sur votre site Web que dans votre magazine et à travers vos balados. Je ne connais personne d’autre qui fait un aussi bon travail pour offrir l’occasion aux Québécoises et aux Québécois d’explorer des sujets aussi variés et importants en interac- tion avec la foi. Bonne continuation! Jeremy F. – Verdun Incarnée et humaine Je ne suis pas très «catholique», même si je suis baptisé. Je trouve que l’Église a besoin de réajuster son tir pour diminuer les préjugés qu’elle continue de nourrir par ses prises de position. Votre revue permet des réflexions intéressantes qui semblent davantage incarnées. Je ne suis pas toujours d’accord avec tout, mais j’apprécie l’hu- manité qui s’en dégage. Merci pour votre beau travail. Jacquelin R. – Lac-aux-Sables Cher Jacquelin, comme disait Péguy, une revue vivante n’est pas une revue qui plait toujours à tous, mais qui réussit à ne déplaire pas toujours aux mêmes lecteurs. AuVerbe, nous aimons la diversité des points de vue, et votre message nous confirme que notre option préféren- tielle pour le dialogue est d’actualité.
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Voici venu le temps des couronnes de l’Avent. Traditionnellement pourvue de 4 bougies, elle permet, par l’allumage d’une bougie chaque dimanche avant Noël, de patienter jusqu’au jour anniversaire de la naissance du Christ.
Mais connaissez-vous l’origine de cette tradition ? Comme toujours, la tradition chrétienne a adapté à son compte les symboles païens. La couronne , par se forme circulaire, évoque la course du soleil et le retour de la lumière. Les jours vont bientôt s’allonger, lors du solstice d’hiver ( le jour de Noel?). Voyons plutôt :
L’Avent
Nous ne savons peut-être plus vraiment d’où vient le mot « Avent »… Il vient du mot latin « adventus » qui veut dire « avènement ». C’est un terme grec à l’origine primitive et qui fut traduit en latin par « adventus« . (et qui dit grec, dit paiens )
Ces termes sont employés pour designer la venue du Christ parmi les hommes lors de sa naissance comme pour signifier son avènement glorieux à la fin des temps. C’est pendant ce temps que sont chantées les fameuses antiennes « O » les jours précédents Noël.
O sapientia, O Sagesse du Très-Haut; O Adonaï, O Adonaï, chef de la maison d’Israël;O Radix Jesse, O Rejeton de Jessé; O Clavis David, O Clé de David, O Oriens, O Orient, Splendeur de la Lumière étenelle, O Emmanuel, O Emmanuel…
Une troisième signification se rapporte à cet « Adventus« , c’est celle que la Liturgie nous propose de vivre: la naissance du Christ dans son Église et en chacun d’entre nous. Ainsi, avec le premier dimanche de l’Avent commence l’année liturgique et tout le chemin de transfiguration que le Christ propose. Notons tout de même que le sapin, symbole de vie éternelle n’est pas fréquent en Israel.
Les textes liturgiques du temps de l’Avent nous invitent à rencontrer trois grands témoins de cette attente universelle:
Le prophète Isaïe qui exprime toute son espérance messianique en annonçant la naissance de l’Emmanuel. Il incarne à la fois celui qui annonce la venue de Dieu et celui qui chante les plus sublimes désirs de l’humanité.
Jean-Baptiste qui annonce la venue proche du messie et qui invite à un baptême de conversion (du latin convertere, se tourner vers/avec) pour s’y préparer. Il est le précurseur, celui qui montre le chemin de l’humilité pour laisser croître le Germe divin. La Saint Jean d’Hiver, jour du solstice où la lumière revient
La Vierge Marie qui accepte humblement d’être la mère du messie. Elle est le symbole de l’habitation de Dieu en nous, la matrice de toute vie divine. La lumière est en chacun de nous, il convient de la faire croître et de la laissez vivre, comme un enfant.
La couronne de l’Avent
La couronne de l’Avent trouve ses origines dans le nord de l’Allemagne au 16e siècle (chez les luthériens). Elle était alors destinée à accompagner la méditation des fidèles à l’approche de Noël. Cette tradition se répandit ensuite aux Etats-Unis par l’intermédiaire des émigrés allemands et se répandit à travers l’Europe dans les années 50. On la voit se répandre depuis les années 80 en France, même si bien évidemment elle était depuis longtemps déjà connue des Lorrains et des Alsaciens. Au tout début de son existence, on allumait une bougie tous les jours pendant les 24 jours précédant Noël. On a ensuite simplifié cette coutume pour ne garder plus que les 4 bougies correspondant aux dimanches.
Les branches de la couronnes sont en sapin. Leur couleur verte signifie la VIE. Elles sont souvent ornés de rubans rouges et des pommes de pins.
Les couronnes ont depuis l’antiquité revêtues diverses significations. Elles évoquent le soleil et annoncent son retour. Du fait de sa rondeur, la couronne rappelle généralement le cycle, le renouveau…
Dans le contexte chrétien, elle rappelle l’attente du Christ.
Les quatre bougies que l’on fixe sur la couronne ont aussi leur importance. Chaque dimanche, on allume une bougie de plus et, plus Noël approche, plus il y a de lumière… Ces quatre bougies symbolisent la Lumière de Noël qui viendra illuminer le cœur humain de Paix et de Joie.
Le symbolisme des quatre bougies de l’Avent résument les grandes étapes du Salut précédant la venue du Messie: bien vu! bonne récup
La première bougie est le symbole de la Miséricorde reçue par Adam et Eve
La deuxième bougie est le symbole de la Foi d’Abraham et des patriarches qui se sont mis en quête de la terre promise
La troisième bougie est le symbole de la Joie de David dont la lignée ne s’arrêtera pas. Elle témoigne de l’Alliance avec Dieu
La quatrième bougie est le symbole de l’Enseignement des prophètes qui annoncent un règne de Justice et de Paix
L’Action de l’Église
Elle remplaça systématiquement Prométhée par l’archange (Elfe*) Michel mais, comme elle eut du mal à éliminer la roue à six branches (Rune* Hag-all “plénitude” ou “tertre suprême”) il lui fallut inventer le chrisme khi-rho
Le Soleil ne mourra pas ! ( lumière divine ou foi chrétienne)
Noël, le Dies Natalis et les Saturnales des Romains, était la célébration de la renaissance cyclique du soleil, de l’astre-roi sans qui la vie ne serait pas possible. Pendant la période du solstice d’hiver, les jours reprennent leur souffle avant de croître à nouveau. La lumière et la vie reviennent. Apollon, Balder, Abellio, et Mithra reviennent.
Bélénos Apollon :Balder : Le Dieu apparaît alors sous la forme de l’enfant-soleil, un nouveau-né qui annonce le renouvellement enfin accompli de la nouvelle vie et du nouveau soleil.
Les chrétiens en firent, 250 ans après la mort du nazaréen, le jour de la naissance du petit jésus venu racheter « nos péchés ».
Selon la tradition ancestrale, le solstice d’hiver était une période de joie et d’allégresse, le retour de la puissance des Dieux, la vie qui se manifeste à nouveau, la lumière qui recommence son chemin de croissance et de gloire. Ce sont ces motifs sacrés qui entouraient la fête païenne.
Mais Noël n’est pas seulement la joie, c’est aussi une époque de recueillement.
Au sortir de la période du déclin solaire, l’automne, époque célébrant la mort apparente de la nature, il était coutume de se recueillir en l’honneur de ses morts et de tous ceux qui ont fait nos lignées, ancêtres sans qui nous ne serions pas là aujourd’hui. La vie se meurt, mais de la mort renaît la vie.
Le chamanisme n’est pas une « religion » au sens habituel du mot, un ensemble déterminé et transmissible de croyances et de rites.
Il s’agit d’abord d’une pratique, essentiellement individuelle, mais s’exerçant de façon privilégiée dans un cadre familial et tribal. Tournée vers l’appréhension et la mobilisation effective d’un monde de la surnature, la pratique chamanique catalyse aussi en retour, en ce monde-ci, de profondes transformations personnelles et collectives. Différents niveaux de réalité peuvent entrer en jeu, d’ordre physiologique, biologique, neurochimique, psychologique, linguistique, culturel et sociétal, se traduisant par des comportements physiques et des vécus extrêmes, et induisant aussi des représentations mentales et conceptuelles, dont certaines pourraient être qualifiées de cosmologiques, de philosophiques et de théologiques, pour autant que ces mots d’origine grecque puissent convenir, même approximativement, dans le contexte de cultures tout autres.
Pour le dire autrement, les pratiques chamaniques ouvrent des portes inattendues vers d’autres univers de conscience. Par leur nombre, leur ancienneté, leur universalité, elles dénotent l’effort réflexif des premières consciences humaines pour se saisir de quelques-uns des mystères objectifs de l’univers, mais aussi de leur propre mystère, celui de l’abysse subjectif que toute conscience porte en elle, de façon immanente.
L’expérience chamanique requiert, d’emblée, de toute personne qui la pratique, une « sortie du soi », littéralement une « extase » si l’on se rapporte au sens de ce mot en grec, et elle implique, concomitamment, une liaison active, dynamique, une capacité de synergie avec la totalité de la vie, telle qu’elle croît et s’étale sur cette planète, et aussi telle qu’elle peut se concevoir et être perçue peut-être, à travers l’univers entier, le cosmos total.
C’est un fait dûment observé historiquement (et, fort probablement, expérimenté depuis les temps longs de la Préhistoire) que les pratiques chamaniques, sous toutes les latitudes, ont pu bénéficier des puissantes propriétés psychotropes de diverses plantes et fungi alcaloïdes, et en subir la puissance nue, bouleversante, s’imposant de facto aux corps et aux cerveaux d’Homo sapiens, et avant lui, à ceux des lignées d’homininés et d’hominines dont il est issu.
C’est aussi un fait que des plantes alcaloïdes sont aujourd’hui couramment ingérées par toutes sortes de mammifères et de primates, comme cela a été fait depuis des millions d’années par nombre d’espèces d’hominoïdes et d’hominidés.
Les plantes alcaloïdes contiennent des molécules chimiquement actives, aux très diverses propriétés, analgésiques, calmantes, dormitives, mais aussi toniques, stimulantes, dopantes, et enfin, psychoactives et psychotropes… Des noms d’alcaloïdes comme la caféine, la nicotine, l’atropine, la morphine, la cocaïne ou l’ibogaïne, donnent une idée de la gamme, de la puissance et de la toxicité éventuelle des effets provoqués.
Le fait que des molécules issues de végétaux alcaloïdes soient actives, et même particulièrement efficaces, chez les animaux et les humains, implique une réceptivité spéciale de leurs systèmes nerveux et neuronaux vis-à-vis de ces molécules. On peut en induire une complémentarité biochimique entre les deux règnes, le végétal et l’animal, capable de produire de puissantes synergies, sans doute basées sur l’existence de structures communes, de résonances partagées, de vibrations fondamentales, comme celles observées dans ces composés organiques aromatiques hétérocycliques, les indoles.
C’est là un constat qui traverse les règnes et les espèces. Les champignons et les lichens, les vaches et les rennes, les primates et les humains partagent des formes analogues de réceptivité biochimique, et arborent des sensibilités (certes différenciées, mais biochimiquement comparables) à certaines réactions spécifiques au niveau intramoléculaire. Ces réactions moléculaires sont susceptibles d’entrer en résonance à des échelles de plus en grandes, jusqu’à s’imposer macroscopiquement dans les réseaux des hyphes chez les champignons, dans les systèmes nerveux des animaux ou à l’ensemble des synapses du cerveau des humains.
Partant du constat que des composés aromatiques de simples plantes alcaloïdes peuvent avoir un puissant impact sur les états de conscience de Homo sapiens, aujourd’hui, on est en droit de demander quel rôle ces plantes à effet psychotrope ont pu jouer, à la suite de leur consommation depuis des dizaines ou des centaines de milliers d’années, dans l’émergence des rites, des croyances, des cultes, des cultures, des langues et des religions?
Dans les commencements, plus ou moins par hasard, mais avec de fortes probabilités tout de même, compte-tenu de l’abondance relative de plantes alcaloïdes à effet psychotrope dans la nature, de vives fulgurations synaptiques, de brillantes illuminations extra-sensorielles, violentes mais ponctuelles ou transitoires, ont pu être biochimiquement initiées chez les homininés et les hominines, les pré-humains et les premiers humains, par le seul effet des molécules psychotropes sur les cellules neuronales du cerveau.
Par la suite, favorisés par l’accoutumance, par l’augmentation progressive de la consommation de plantes psychotropes en qualité comme en quantité, et surtout par l’adaptation, culturelle et cultuelle, à des chocs biochimiques irradiant les systèmes synaptiques, certes peu préparés a priori à les subir, mais capables a posteriori d’adaptation épigénétique, les premiers éclairs synaptiques relativement localisés dans tel ou tel lobe cervical, ont commencé à entrer en résonance, à se multiplier et à s’intensifier, jusqu’à s’étendre au cerveau tout entier et à provoquer des formes d’illumination de la conscience elle-même, et jusqu’à favoriser son émergence elle-même.
Une étape irréversible fut alors franchie : la conscience prit conscience d’elle-même, elle prit conscience de sa propre immanence, elle prit du même coup conscience de la naissance en elle du moi, qui restait à consolider, à enrichir et à adosser aux profondeurs du soi.
L’embrasement total de la conscience a été facilité par l’action des psychotropes, mais ne peut se réduire à leurs seuls effets, entre incendie et lumière.
Pour changer de métaphore, les réseaux de synapses et les facultés systémiques du cerveau humain ont dû nécessairement jouer leur propre partition dans cette symphonie générale, où la biochimie des psychotropes a pu donner un tempo initial à l’orchestre, et participer à l’éclat de ses cuivres, sur fond de percussions, mais où d’autres instruments, les cordes du mental et les bois du psychisme, devaient assurer, pour leur part, la progression des harmonies et le déploiement des thèmes mélodiques.
Les explosions des résonances synaptiques ont catalysé la genèse d’une conscience de plus en plus accomplie de la conscience par elle-même. Mais la conscience, on le suppute, ne peut être seulement un phénomène biochimique ou neuro-synaptique, c’est-à-dire un phénomène seulement matériel. En effet, les pointes les plus élevées atteintes par la conscience, les extases et les illuminations qu’elle est capable de vivre, selon de multiples et anciens témoignages, l’emmènent vers des mondes absolument séparés de la matière, et seulement constitués de pures énergies, de dépassements en devenir, de volontés en vol, d’initiations aux réalités de la surnature.
Les expériences d’illumination extatique, répétées par d’innombrables générations d’Homo sapiens, ont sans doute contribué à de nouvelles formes de développement épigénétique du cerveau. Par effet de rétroaction positive, elles ont tiré avantage de sa plasticité et de sa malléabilité intrinsèques, pour l’inciter à aller toujours plus loin dans cette quête extatique.
Elles ont engendré la possibilité d’états de conscience toujours plus ultérieurs, elles ont facilité des niveaux de conscience bien supérieurs, par des dépassements toujours plus audacieux, jusqu’à l’entrée (longtemps considérée impensable, et improbable) dans la transcendance même, — bien loin de la seule immanence des lichens, très loin de la sourde activité des levains et des levures, ou de la vibration des indoles, mais n’en perdant cependant pas le souvenir, ni l’antique ancrage.
Quel a été l’effet mondial, global, de cette promotion progressive d’hominidés foudroyés par la chime des alcaloïdes, puis d’humains « extasiés » par leur truchement, dans l’ordre implicite de la nature ?
L’exposition prolongée à l’expérience extatique, la rupture répétée des points de vue terrestres et des références quotidiennes, ont été des conditions de possibilité pour un accès soudain, brutal, envahissant, à l’extase, et, par elle, à un point de vue incluant une forme d’aperception de ce que l’on ne peut qu’appeler le Tout Autre.
Homo sapiens est apparu sur terre il y a environ 100 000 ans. Mais Homo abilis et Homo erectus, apparus il y a plus d’un million d’années, ont sans doute, comme les Primates d’aujourd’hui, su consommer eux aussi des alcaloïdes. Ce faisant, ces générations oubliées de proto-humains, et d’autres générations d’ancêtres plus oubliées encore, depuis des millions d’années, ont contribué à transformer, dissoudre, reformer, réformer, puis élever, exacerber, sublimer, transcender, ce qui tenait lieu de « proto- ego » chez les Hominoidea (Hominoïdés), les Hominidae (Hominidés), les Homininae (Homininés), les Hominini (Hominines)i, avant que se constitue enfin l’« ego » des Homo sapiensii, qui firent eux aussi l’expérience de l’extase, mais surent la nourrir et la cultiver davantage, l’approfondir par le langage, l’art et la religion…
L’utilisation de plantes psychotropes dans un contexte d’initiation chamanique peut, dans certains cas, dissoudre la structure nouée de l’ego en un sentiment indifférencié du soi, que la philosophie orientale appelle le Tao.
Mais cette dissolution de l’ego, si elle a lieu, peut n’être aussi que transitoire et relative. Elle peut donner alors naissance à une capacité analytique et critique aiguë, une capacité d’atteindre et de pénétrer intimement l’essence même de ce dont témoignent le fait religieux et les divers systèmes philosophiques qui lui sont associés.
R. Gordon Wasson fut certes pionnieriii lorsqu’il affirma, sur la base de travaux d’ethnobotanique et d’ethnomycologie initiés dès les années 1930, et publiés dans les années 1950, que la religion est née lorsque les premiers humains ont rencontré et apprivoisé la puissance des alcaloïdes hallucinogènes.iv
En cela il se montrait par avance en profond désaccord avec les thèses de Mircea Eliade. Celui-ci, dans son étude sur le chamanismev, parue plusieurs années après les travaux de R. Gordon Wasson, considérait ce qu’il appelait le chamanisme « narcotique » comme étant « décadent ». Des chamans qui ne peuvent pas atteindre l’extase sans psychotropes sont le symptôme, selon Eliade, que leur culture a perdu son authentique saveur, et qu’elle est probablement dans une phase terminale.
R. Gordon Wasson, s’appuyant sur des travaux datant de l’occupation du Mexique par les Espagnols comme ceux du père franciscain Bernardino De Sahagúnvi, rappelle que les Aztèques appelaient leurs champignons teo-nanácatl, la « chair de Dieu ». Il ne résista pas, bien sûr, à faire aussitôt un rapprochement, ou ce qu’il appela un « parallèle troublant », avec la conception chrétienne de l’Eucharistie, célébrant la mémoire de la Cènevii.
Il y a cependant une différence, note-t-il, entre la consommation du champignon, « chair de Dieu », et celle de l’hostie, « corps du Christ ». « Le chrétien orthodoxe doit accepter par la foi le miracle de la conversion du pain en chair de Dieu ; c’est ce que signifie la doctrine de la transsubstantiation. En revanche, le champignon des Aztèques est porteur d’une conviction propre : chaque communiant témoigne du miracle qu’il vit effectivement. Dans la langue des Mazatèques, les champignons sacrés sont appelés ‘nti šitho’. Le premier mot, nti, est une particule exprimant la révérence et l’affection. Le second élément signifie ‘ce qui jaillit’. »viii
Voulant en avoir le coeur net, R. Gordon Wasson a demandé à un Indien mexicain, illettré mais parlant espagnol, pourquoi les champignons sacrés étaient appelés ‘ce qui jaillit’.
« Sa réponse, époustouflante de sincérité et de sentiment, était empreinte de la poésie de la religion, et je la cite mot à mot telle qu’il l’a donnée :
‘El honguillo viene por si mismo, no se sabe de dónde, como el viento que viene sin saber de dónde ni porqué’. »ix
« Le petit champignon vient de lui-même, personne ne sait d’où, comme le vent vient, on ne sait d’où ni pourquoi. »
Les puissantes propriétés de ces champignons sacrés leur ont permis de recevoir, chez les Aztèques, la noble dénomination, aux connotations autant métaphysiques que mystiques, de « chair de Dieu ». Pourtant, le mystère de la transsubstantiation de la chair champignonnesque en visions divines n’a, somme toute, qu’une origine purement biochimique, du moins les esprits positivistes peuvent le penser.
Ayant été associé aux recherches en ethnomycologie de Gordon Wasson, et ayant voyagé avec lui sur le terrain au Mexique, le célèbre Dr Albert Hoffmann, de la firme pharmaceutique suisse Sandoz, réussit à isoler et identifier les principes actifs de ces champignons mexicains. Ils se révélèrent être la psilocybine et la psilocine, deux tryptamines de la famille des indoles.x On sait qu’Albert Hoffmann synthétisa aussi le LSD avec Arthur Stoll en 1938, à partir de l’ergot de seigle (Claviceps purpurea), un champignon qui affecte l’épi de céréales comme le seigle ou le blé, et dont on connaissait déjà les effets psychotropes au Moyen-âge, et certainement aussi depuis des temps bien plus reculés.
Dans une de ses publications sur les champignons hallucinogènes du Mexiquexi, R. Gordon Wasson estima que les ‘visions’ de William Blake n’étaient pas sans rapport avec celles provoquées par les champignons. Bien qu’il ne fût pas dans son intention d’affirmer positivement que William Blake connaissait les effets psychotropes des champignons, il ne put s’empêcher d’établir un lien avec le « récit poignant » que William Blake fit de ses ‘visions’ :
« Les prophètes décrivirent ce qu’ils ont vu en vision comme des hommes réels et existants, des hommes qu’ils ont vus avec leurs organes imaginatifs et immortels; les apôtres firent de même ; plus l’organe est clair, plus l’objet est distinct. Un Esprit et une Vision ne sont pas, comme le suppose la philosophie moderne, une vapeur trouble, ou un rien : ils sont organisés et minutieusement articulés au-delà de tout ce que peut produire la nature mortelle et périssable. Celui qui n’imagine pas selon des perspectives plus fortes et meilleures, et dans une lumière plus forte et meilleure que celle que son œil périssable peut voir, n’imagine pas du tout ».xii
Wasson commente ainsi ce texte de William Blake:
« Cela doit paraître énigmatique à celui qui ne partage pas la vision de Blake ou qui n’a pas pris le champignon. L’avantage du champignon est qu’il permet à beaucoup (sinon à tout le monde) d’accéder à cet état sans avoir à subir les mortifications de Blake et de S. Jean. Il vous permet de voir, plus clairement que ne peut le faire notre œil de mortel en perdition, des panoramas au-delà des horizons de cette vie, de voyager dans le temps, de pénétrer dans d’autres plans d’existence, et même (comme le disent les Indiens) de connaître Dieu. Il n’est pas étonnant que vos émotions soient profondément affectées et que vous sentiez qu’un lien indissoluble vous unit à ceux qui ont partagé avec vous l’agapé sacrée. »xiii
Puis Wasson élargit sa réflexion, et développe une théorie de l’extase et de la rencontre avec le Divin:
« Vous savez enfin ce qu’est l’ineffable, et ce que signifie l’extase. L’extase ! L’esprit remonte à l’origine de ce mot. Pour les Grecs, l’ekstasis signifiait la fuite de l’âme hors du corps. Pouvez-vous trouver un meilleur mot que celui-là pour décrire l’état d’extase ? Dans le langage courant, parmi les nombreuses personnes qui n’ont pas connu l’extase, l’idée d’extase semble amusante, récréative, et on me demande souvent pourquoi je ne prends pas de champignons tous les soirs. Mais l’extase n’est pas amusante. Votre âme même est saisie et secouée jusqu’à ce qu’elle tremble et frissonne. Après tout, qui choisira volontiers de ressentir une terreur à l’état pur, ou de flotter à travers cette porte là-bas qui mène dans la Présence Divine ? Le vulgaire ignorant abuse de ce mot, mais nous devons être conscient de son véritable sens, qui est terrifiant. … Lorsque l’homme émergea de son passé brutal, il y a des milliers d’années, il y eut un stade dans l’évolution de sa conscience où la découverte d’un champignon (ou était-ce une plante supérieure ?) aux propriétés miraculeuses fut une révélation pour lui, un véritable détonateur pour son âme, éveillant en lui des sentiments de crainte et de révérence, de douceur et d’amour, au plus haut degré dont l’humanité est capable, tous ces sentiments et ces vertus que l’homme a toujours considérés depuis comme l’attribut le plus noble de son espèce. Elle lui a fait voir ce que cet œil mortel en perdition ne peut voir. Comme les Grecs avaient raison d’entourer ce Mystère, cette absorption de la potion, de secret et de surveillance ! ».xiv
Dans un autre texte, R. Gordon Wasson rapporte que, selon les Indiens Nashua du Mexique, le champignon sacré « parle » (es habla). « Il parle de beaucoup de choses, de Dieu, du futur, de la vie et de la mort, et il peut aussi dire où se trouvent les choses qu’on a perdues. On voit toutes choses, et on voit aussi où Dieu est. »xv
Il est fort curieux que les métaphores de la « chair de Dieu » et de la « parole » puissent être ainsi attribuées aux champignons sacrés du Mexique.
Prenant un peu de recul, et cherchant à adopter un point de vue structurel, on peut voir se nouer une sorte de noeud serré entre le niveau moléculaire, immanent, objectif et en un sens « matériel », des indoles et des groupes aromatiques, le niveau organique et « existentiel » des lichens et des hyphes, des champignons et des plantes alacaloïdes, le niveau subjectif et « phénoménologique » s’exprimant dans la proto-conscience d’animaux et de primates et dans la conscience des humains, et enfin le niveau littéralement « surnaturel », essentiellement « spirituel », que ceux qui ne l’ont pas connu ne peuvent concevoir, et dont on ne peut rien dire de certain, sauf à s’en rapporter à des témoignages de toutes sortes, de toutes les époques et de tous les horizons culturels.
Mais leur lecture critique et synoptique incite à les faire converger, en somme, sur l’attestation de l’existence réelle et effective du Divin, dans toute sa puissance et son ineffabilité.
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NOTES
iCf. les ouvrages de Michael Benton. Vertebrate Paleontology, (2000), Guillaume Lecointre et Hervé Le Guyader, La classification phylogénétique du vivant (2001), Colin Tudge, dans The Variety of Life, Oxford University Press (2000), pour une discussion technique sur ces classifications, résumée ici.
iiCf. Steven Mithen. The Prehistory of the Mind. A Search for the origins of art, religion and science. Thames and Udson, London, 1886. « The appearnce of Homo sapiens sapiens in the fossil record at 100.000 years ago. » (p.178)
iiiRoger Heim, du Muséum national d’histoire naturelle, écrit : « C’est à M. et Mme WASSON que revient le mérite d’avoir, les premiers parmi les Blancs, participé directement aux cérémonies indiennes, absorbé au moins deux des espèces de champignons sacrés — Psilocybe mexicana et caerulescens var. Mazatecorum —, éprouvé les étonnants symptômes que les auteurs espagnols des xvi e et xvii e siècles avaient signalés d’après les relations des indigènes, décrit en détail ces sensations. » in Roger Heim et R. Gordon Wasson. Les champignons hallucinogènes du Mexique. Archives du Muséum national d’histoire naturelle, Paris, 1958
ivR. Gordon Wasson. The Hallucinogenic Fungi of Mexico : An Inquiry into the Origins of the Religious Idea among Primitive Peoples. Botanical Museum Leaflets. Harvard University. Cambridge. 1961, p.142-144 . « Our own remote ancestors, perhaps 4,000 years ago, worshipped a divine mushroom. It seemed to us that this might explain the phenomenon of mycophilia vs. mycophobia, for which we found an abundance of supporting evidence in philology and folklore. (…) In the fall of 1952 we learned that the 16th century writers, describing the Indian cultures of Mexico, had recorded that certain mushrooms played a divinatory rôle in the religion of the natives (…) This Middle American cult of a divine mushroom, this cult of ‘God’s flesh’ as the Indians in pre-Columbian times called it, can be traced back to about B.C. 1500 (…)Thus we find a mushroom in the center of the cult with perhaps the oldest continuous history in the world. (…) I will give you the distinctive traits of this cult of a divine mushroom, which we have found a revelation, in the true meaning of that abused word, but which for the Indians is an every-day feature, albeit a Holy Mystery, of their lives ».
vMircéa Eliade, Le chamanisme et les techniques archaïques de l’extase. Payot, 1968
viBernardino De Sahagún, Historia General de las Cosas de Nueva España . « Un champignon est appelé teo-nanácatl. Il pousse dans les endroits incultes, sous l’herbe. Le chapeau est rond, le pied est allongé. Par son âcreté, il fait mal, il fait mal à la gorge. Il enivre, donne des étourdissements, rend violent. Il soulage dans les fièvres et la goutte. Il ne faut en manger que deux ou trois. Il fait souffrir, cause de l’affliction, rend inquiet, incite à s’enfuir, effraye, pousse à se cacher. Celui qui en mange beaucoup voit beaucoup de choses. Il terrifie les gens, les fait rire. Il s’étrangle, se précipite d’endroits élevés, pleure, est épouvanté. Quand il le mange dans le miel, il dit : «Je mange des champignons, je me champignonise . » On dit du fanfaron, du vantard, du vaniteux : « Il se champignonise. »
viiDans l’Évangile de Luc : « Prenant du pain, il rendit grâces, le rompit et le leur donna en disant : ceci est mon corps livré pour vous; faites cela en mémoire de moi. » Il fit de même pour la coupe après le repas, disant : » Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang ». » (Luc 22, 14-20) Dans l’Évangile de Matthieu : » Pendant qu’ils mangeaient, Jésus prit du pain; et, après avoir rendu grâces, il le rompit, et le donna aux disciples, en disant: Prenez, mangez, ceci est mon corps. Buvez en tous, car ceci est mon sang, le sang de l’Alliance qui va être répandu pour une multitude en rémission des péchés. » (Matthieu 26, 26-27)
viiiR. Gordon Wasson. The Hallucinogenic Fungi of Mexico : An Inquiry into the Origins of the Religious Idea among Primitive Peoples. Botanical Museum Leaflets. Harvard University. Cambridge. 1961, p.146 .
ixR. Gordon Wasson. The Hallucinogenic Fungi of Mexico : An Inquiry into the Origins of the Religious Idea among Primitive Peoples. Botanical Museum Leaflets. Harvard University. Cambridge. 1961, p.147
xAlbert Hoffmann, The Chemistry of Natural Products, Aug. 18, 1960, Proceedings of the I.U.P.A.C. Symposium, Melbourne.
xiR. Gordon Wasson. The Hallucinogenic Fungi of Mexico : An Inquiry into the Origins of the Religious Idea among Primitive Peoples. Botanical Museum Leaflets. Harvard University. Cambridge. 1961, p.154
xiiThe Writings of William Blake ed. by Geoffrey Keynes, vol. III, p. 108
xiiiR. Gordon Wasson. The Hallucinogenic Fungi of Mexico : An Inquiry into the Origins of the Religious Idea among Primitive Peoples. Botanical Museum Leaflets. Harvard University. Cambridge. 1961, p.154
xivR. Gordon Wasson. The Hallucinogenic Fungi of Mexico : An Inquiry into the Origins of the Religious Idea among Primitive Peoples. Botanical Museum Leaflets. Harvard University. Cambridge. 1961, p.157
xv« The mushroom itself ‘is speech’, es habla, [Aurelio] would say, and it speaks of many things, of God, of the future, of life and death, and also it tells where to find things that are lost. One sees everything, one sees where God is also-.se ve todo; se ve donde está Dios tambien. » Valentina Pavlovna Wasson et R. Gordon Wasson. Mushrooms, Russia and History, Pantheon Books, New York, Vol. II, 1957,p.253
La conception juive du rapport avec Dieu a été symbolisée, dès l'origine, par la figure de "l'alliance", telle que conclue initialement avec Abraham et renouvelée avec Moïse (alliance valant pour le peuple tout entier et les innombrables générations). Puis, avec les prophètes ultérieurs, le contenu de cette "alliance" évolue et…
« La conception de l'histoire comme processus linéaire progressif, écrit Octavio Paz dans Points de convergence (1974), s'est révélée inconsistante. Une telle croyance est née avec l'époque moderne et fut, d'une certaine manière, sa justification, sa raison d'être. Sa faillite révèle une fracture au cENtre même de la conscience contemporaine.
La modernité commence à perdre foi en elle-même. [...] D'où il ressort que nous devons édifier une éthique et une politique sur la poétique du maintenant. La politique cesse d'être la construction du futur : sa mission est de rendre le présent habitable. [...] Vivre dans le maintenant, c'est vivre face à la mort. L'homme inventa les éternités et les futurs pour échapper à la mort, mais chacune de ces inventions fut un piège mortel. Le maintenant nous réconcilie avec notre réalité de mortels.
Ce n'est que devant la mort que la vie est réellement la vie.
Dans le maintenant, notre mort n'est pas séparée de notre vie.
L'une et l'autre sont la même réalité, le même fruit ». (1)
On savait que l’Ordre des médecins et celui des pharmaciens manquaient d’humour, qu’ils étaient confits dans le formol de leurs certitudes dépassées, certitudes médicales et politiques (étrangement) mêlées. Pas de surprise de ce coté-là, donc : la pharmacienne qui avait affiché un message légèrement humoristique, disons moitié vrai moitié drôle, s’est vue convoquer par le Conseil de l’Ordre des pharmaciens pour ce défi au ministère de la Vérité covidique.
« Je suis vaccinée quatre fois, je ne suis pas contre le masque, pas contre le vaccin mais maintenant qu’on a fait le job, laissez les gens vivre. (...) Il faut laisser un peu les gens vivre leur vie. S’ils veulent faire une nouvelle dose, c’est à eux de décider. S’ils doivent mettre le masque, c’est à eux de voir. Laissez les gens, ne les infantilisez pas. C’est tout le message que je porte. » (Ève Khalatbari, la pharmacienne sur BFM Lyon)
« Un nouveau variant arrive, il va choquer le monde. Il s’appelle vérité 2 »
« Je pense que c’est plutôt une maladresse d’écrire ça. Je ne sais pas ce qu’elle a écrit la veille, je ne sais pas ce qu’elle va écrire demain. (...) Il faut avoir un message clair, qu’il y a un virus et qu’on doit faire tout ce qu’il faut pour l’éliminer et pour protéger notre population. » (Didier Vieilly, vice-président du Conseil de l’Ordre des pharmaciens d’Auvergne-Rhône-Alpes)
En France, le dazibao est interdit, l’expression directe présente un danger pour la propagande officielle, dont on rappelle le contenu, de la voix même du ministre de la Destruction de la santé publique, François Braun :
Si on écoute ce sympathique monsieur, qui vient d’on ne sait où, il faudra se faire injecter un liquide inconnu dans le corps deux ou trois fois par an pour être un bon citoyen, ce qui donne immédiatement envie d’en être un mauvais, et de stopper l’hémorragie d’argent public au profit du Big Pharma et au détriment de l’hôpital public et de la médecine de ville, un peu dévalorisée. On n’oubliera pas que ces milliers de médecins n’avaient pas eu le droit de soigner les Français atteints de l’étrange grippe wuhanaise en 2020... Ils réclament une revalorisation du tarif de base.
Profitons-en pour diffuser ce constat lucide sur le soin français et son délitement :
Pas assez de médecins, un hôpital qui se délabre sous les coups de boutoir du néolibéralisme d’État, des ministres mouillés jusqu’au cou dans des liens d’intérêts avec le Big Pharma, une population maltraitée, menacée, tabassée...
La France est malade, mais malade de sa tête. C’est la tête qui déconne, pas le corps social. Les ennuis de la pharmacienne lucide ne changeront pas cette réalité. On finira sur une note d’humour avec le triste spectacle de la presse locale, Le Progrès pour ne pas le nommer, qui a osé le magnifique :
Pub des labos Deray !
Pour ceux qui croiraient encore au narratif officiel...
Inscrire un « droit à l’avortement » dans la Constitution est symbolique mais pas anodin.
Par Philippe Oswald - Publié le 03 décembre 2022 - Photo : Shutterstock
Le 25 novembre, l’Assemblée nationale a adopté à une large majorité (337 voix pour, 32 contre) la proposition de loi présentée par Mathilde Panot ( LFI) « visant à protéger et à garantir le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse » en l’inscrivant dans la Constitution. Cette proposition de loi a été déposée en réaction à une décision de la Cour suprême des États-Unis du 24 juin 2022 (cf. LSDJ n° 1622 et LSDJ n°1635) qui ne permet ni n’interdit l’avortement mais rend à chaque État fédéral la liberté de légiférer. En France, pays unitaire dont la constitution et les mentalités sont très éloignées des mœurs et du système politique américains, on ne voit pas ce qui menacerait la pratique de l’avortement, garantie par la loi du 17 janvier 1975. Le fait est que la France est en tête des pays européens pour le nombre officiel d’IVG par habitant. Selon la Direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques (DREES), « alors que le nombre d’IVG oscille depuis le milieu des années 2000 autour de 225 000 par an, le taux global de recours à l’IVG tend à augmenter, dans un contexte où le nombre de femmes en âge de procréer baisse ». Face à un tel « score » (deux fois plus d’avortements en France qu’en Allemagne), l’urgence exige une politique de prévention de ce drame intime et de ce fléau social qui touche de plein fouet les couches les plus fragiles de la population.
Le texte proposé à l’Assemblée a été finalement voté sous la formule suivante : « La loi garantit l’effectivité et l’égal accès au droit à l’interruption volontaire de grossesse ». S’il est voté dans les mêmes termes par le Sénat, le « droit à l’avortement » pourra être intégré dans un nouvel article de la Constitution, autrement dit, sacralisé : une constitution, c’est en quelque sorte l’âme d’un régime politique, son principe vital...Notons que la partie paraît bien engagée pour Mathilde Panot, rapporteur du texte : bien qu’appartenant à l’opposition de l’extrême-gauche LFI, elle bénéficie pour son texte d’un avis favorable du gouvernement. Dans son sillage, la majorité des députés a superbement ignoré l’interpellation du député LR Marc Le Fur : « Vous voulez absolument engager ce débat, alors que, dans notre pays, 220 000 avortements sont pratiqués par an. Certains d’entre vous veulent-ils augmenter ce chiffre ? J’ose espérer que non ! » C’est pourtant dans cette direction que s’est engouffrée presque toute l’Assemblée. Sans même concéder la proposition de constitutionnaliser aussi la clause de conscience spécifique des médecins et professionnels de santé (Patrick Hetzel, LR). Marine le Pen, qui avait laissé la liberté de vote aux députés RN, a surpris en déposant un amendement allant dans le sens de la constitutionnalisation.
Parmi les 32 opposants, citons les plus actifs : les LRAnne-Laure Blin, Marc le Fur, Xavier Breton, Patrick Hetzel, Fabien Filippo etEmmanuelle Ménard (non inscrite). Celle-ci a averti les députés : inscrire l’avortement dans la Constitution, « en faire un droit illimité [...] c’est ouvrir la boîte de Pandore et donner prise à toutes les surenchères. Demain, vous voudrez y mettre l’euthanasie, le droit au changement de sexe, la PMA et la gestation pour autrui (GPA) […] Chacun pourra surenchérir ». De fait, au-delà de sa fonction « symbolique », c’est-à-dire, selon Le Larousse, significative d’une intention, l’inscription d’un droit à l’avortement dans la constitution ferait vraisemblablement tomber les dernières restrictions à l’IVG. Il deviendrait possible de l’obtenir jusqu’au terme de la grossesse, voire en raison du sexe de l’embryon ou du fœtus.
Dans l’enthousiasme de la victoire, Mathilde Panot a pressé le gouvernement de déposer un projet de loi reprenant naturellement la proposition votée par la majorité des députés : « Aujourd’hui, l’Assemblée nationale parle au monde, […] La balle est dans le camp du gouvernement : nous attendons le projet de loi du gouvernement ». Cependant, conformément à la procédure, la proposition de loi a été transmise au Sénat où le texte doit être « voté conforme » (c’est-à-dire sans modification) par les sénateurs. Mais puisqu’il implique une révision de la Constitution, il devra en outre être soumis à un référendum ou à un vote des parlementaires, députés et sénateurs, réunis en Congrès à Versailles pour être définitivement adopté (il faut pour cela une majorité des 3/5ème des suffrages exprimés). Une opposition de l’une des deux assemblées, du président de la République ou du Premier ministre empêcherait la révision constitutionnelle d’aboutir. Hypothèse d’école… On s’achemine donc vers une vingt-troisième révision de la Constitution de 1958, ce qui n’est pas le signe d’une grande stabilité politique. Ajoutons que des juristes contestent que l’inscription dans la Constitution d’un « droit à l’avortement » rende celui-ci réellement intouchable par le législateur (article d’Alliance Vita en lien ci-dessous).
L'Occident et le monde entier connaissent une menace nouvelle, qui est sans précédent, pire que les divers virus naturels ou sortis d'une éprouvette, pire que toutes les guerres qui se sont déchaînées jusqu'à présent sur notre malheureux globe, pire que toutes les mafias de ce monde, pire encore que la menace tant redoutée du changement climatique... c'est une menace subtile, impalpable, précisément parce qu'elle est couverte et cachée par un récit continu, obsessionnel et monotone.
Et quel sera le nom de cette menace dangereuse et exacerbée ? Et quel est son impact sur notre vie quotidienne ? Il n'y a qu'une seule définition bien adaptée pour en délimiter les contours, c'est le "goodisme" ou, si l'on ne veut pas utiliser ce néologisme anglo-saxon (certes très "tendance"...), on pourrait l'appeler "politiquement correct". Il s'agit d'une sorte de fièvre hystérique qui trouve son origine exacte dans une perception déformée et distordue de tout ce substrat socio-juridique qui, depuis la Rome antique, constitue la base des systèmes juridiques européens et occidentaux en général, à savoir l'idée de la centralité de la personne et de ses droits.
Une idée qui, avec l'accélération du processus d'économisation du monde entier, s'est élevée à une véritable forme d'hypertrophie d'un "ego", de plus en plus orienté vers lui-même et la satisfaction effrénée de ses propres pulsions, se souciant de moins en moins du respect de lignes de conduite, capables de garantir cette maîtrise de soi nécessaire au respect des devoirs et des limites, alors qu'à la base de la construction de cet "ego fort" ou "moi", l'"ego désirant" représente l'exact contrepoids.
Si au niveau social et au niveau des relations interpersonnelles, les institutions telles que le mariage ou même le couple et les relations familiales ou encore l'équilibre psycho-physique des individus de plus en plus faibles et défaillants se défont au détriment de ce qui a été dit, par l'encouragement subliminal à la consommation de drogues ou de substances psychotropes similaires, mais aussi par une diffusion martelée et tout aussi subliminale de messages publicitaires, visant à exalter et à magnifier tout type de satisfaction débridée de cet "ego", dont nous venons de parler.
Tout cela, afin de détourner les consciences individuelles des problèmes réels, dont la prise de conscience pourrait constituer une réelle menace pour le "statu quo". Mais cette approche ne se reflète pas seulement sur un plan purement personnel, ou tout au plus sur celui des relations interpersonnelles et sociales, mais aussi et surtout sur un plan politique. Et c'est l'idée d'une pensée "forte" capable de répondre aux exigences de la modernité, s'érigeant en élément de défense et de cohésion d'une communauté nationale et de ses institutions, à tous les niveaux : du politique au socio-économique.
Ainsi, le fait de s'opposer à l'entrée forcée de milliers et de milliers de personnes déshéritées et déracinées du tiers-monde, afin de favoriser la pratique infâme du travail servile et du travail criminel, est considéré comme du racisme "tout court", en oubliant, au contraire, combien cette pratique représente une véritable spoliation des ressources humaines de ce même tiers-monde. Ainsi, être contre la consommation de drogues, dans des rassemblements abusifs et chaotiques, au terme desquels il y a souvent des dizaines d'hospitalisations, est considéré comme une forme arbitraire d'autoritarisme et de limitation de la liberté personnelle.
Et donc, à l'inverse, la contestation de mesures répressives et de restrictions sévères aux libertés individuelles, émises sous prétexte de santé publique (comme dans le cas de l'urgence pandémique...) ou le refus d'obligations sanitaires hautement inconstitutionnelles, est considérée comme des positions dignes de réprimandes et d'exécutions médiatiques, en totale incohérence avec le déballage continuel des principes démocratiques de nos constitutions, posés comme panacée et remède à tous les maux du monde.
Ainsi, sur le plan des relations internationales, le fait de s'opposer aux décisions et aux directives du Nouvel Ordre Mondial annonce aux critiques de sévères réprimandes et de graves sanctions. C'est le cas de la Fédération de Russie, qui est même désormais désignée comme un État "terroriste" par les Eurocrates de Bruxelles. Tout cela en oubliant le fait que la réaction militaire contre l'Ukraine a été déclenchée par l'intention manifeste de cette dernière d'adhérer à l'OTAN, dans une fonction ouvertement opposée à son puissant voisin, qui, devant la perspective de voir les missiles de l'alliance atlantique pointés sous son nez et la perpétuation des attaques du régime de Kiev contre les populations russophones sans défense du Donbass, ne pouvait rien faire d'autre qu'intervenir manu militari.
Et ce, malgré les demandes répétées de maintenir au moins une attitude neutre en politique étrangère. C'est ainsi que, sous la bannière d'un sentiment de solidarité mal compris, la décision a été prise de prêter notre concours à une nouvelle prolongation de l'état d'urgence, en adhérant aux sanctions les plus antiéconomiques contre la Fédération de Russie et en érodant davantage le budget public par des dépenses militaires en faveur de l'Ukraine. Tout cela, étrangement, en oubliant le régime d'illégalité totale sous lequel tout cela se déroule. L'OTAN et la soi-disant "Alliance atlantique" trouvent leur raison d'être dans le climat créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, pendant ce qu'on a appelé la "guerre froide". Leur naissance est donc justifiée par un objectif purement défensif, qui est également souligné dans le statut de l'OTAN.
Or, à la lumière des récents événements (et pas seulement ceux-là !), dans les actions de l'OTAN envers la Fédération de Russie, on peut facilement discerner une grave illégalité. Intervenir indirectement dans la querelle qui oppose Moscou et Kiev, en allant jusqu'à fournir à cette dernière des moyens militaires, non seulement ne peut conduire à la fin du conflit, en bridant et en donnant de la force aux prétentions de l'une des parties en conflit, mais surtout, cela représente une véritable ingérence arbitraire de l'OTAN, dont l'Ukraine n'est pas membre. Une illégalité grave, dont les gouvernements occidentaux devront peut-être un jour répondre devant un tribunal international. Ce qui vient d'être énoncé peut sembler une hypothèse farfelue mais, à y regarder de plus près, le bloc de pays alignés sur des positions de soutien ouvert à la Fédération de Russie ou, du moins, animés par un sentiment de profonde méfiance et de distance vis-à-vis des positions occidentales, est d'une ampleur inattendue.
Le Conseil de sécurité des Nations Unies est un organe dépassé : il ressemble plus à un petit cercle d'oligarques privilégiés qu'à un organisme créé pour défendre et protéger la stabilité du monde. C'est pourquoi il a besoin d'une réforme radicale dans le sens d'une plus grande ouverture et inclusivité. L'OTAN elle-même a désormais pris la valeur d'un vestige odieux et obsolète de la guerre froide, dont le seul but semble être, au lieu de la défense des peuples européens, leur assujettissement progressif et suicidaire aux diktats mondialistes. De la même manière qu'au lendemain de la perte de sens du communisme historique, le Pacte de Varsovie s'est dissous sans cérémonie, l'OTAN devrait faire la même chose aujourd'hui au nom de l'équanimité.
Mais le virus su goodisme a frappé au plus profond des âmes européennes. Aux images émouvantes de femmes en pleurs succèdent des images de bombardements et de destruction, accompagnées du mantra consistant à diaboliser le méchant de service, désormais incarné par la Fédération de Russie. Mais peut-être, le virus goodiste a ses heures comptées. Le froid de l'hiver est arrivé non seulement en Ukraine, mais aussi dans les foyers des Italiens et des Européens, rendus encore plus frigorifiés et plus pauvres par les conséquences des sanctions, des privations et de la disette. Et peut-être que ce vent glacial de misère et de privation secouera les consciences endormies par des décennies d'inoculation du virus do-gooder, sanctionnant définitivement la fin de cette contagion malsaine.