SEXOLOGIE - Le Dr Catherine Solano détaille les différences que l'on peut établir entre les deux et nous met en garde sur certaines situations.
Le Dr Catherine Solano est médecin sexologue. Formée à l'éthique de la santé, elle consulte en urologie à l'hôpital Cochin à Paris. Elle est cofondatrice de Doctical, une plateforme de télésanté qui soutient dans leur santé intime les personnes touchées par un cancer. Elle est auteur de nombreux ouvrages, dont Le grand livre de la puberté (éditions Robert Laffont).
En matière sexuelle comme ailleurs, les mots ont un sens. Selon les termes utilisés, le message n’est pas le même. Ainsi, «faire l’amour » ou « avoir un rapport sexuel », ce n'est pas exactement la même chose. Mais quelle est la différence exactement ?
Faire l’amour peut signifier plusieurs choses. Cela peut avoir comme sens de «concrétiser l’amour». Quand on éprouve un sentiment d’amour, on a généralement envie de l’exprimer de manière concrète, afin que ce sentiment ne reste pas dans la tête ou dans le cœur, donc en quelque sorte invisible. Ce sentiment est une force qui a envie de sortir de nous. Faire l’amour met en évidence ce sentiment, en permettant de l’incarner.
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Mais cela peut aussi vouloir dire «fabriquer de l’amour». Quand on vit un rapprochement sexuel, les caresses, le contact peau à peau et encore plus l’orgasme déclenchent une sécrétion d’ocytocine que l’on nomme parfois l’hormone de l’amour. Cette hormone stimule l’attachement entre deux partenaires. C’est pourquoi faire l’amour régulièrement «crée» littéralement de l’amour. Les personnes qui ont des relations régulières avec un ami (ce qu'on appelle familièrement un «sex friend»), et pensent pouvoir arriver à ne pas s’attacher sont dans l’erreur. Elles finissent toujours par s’attacher, parce que leurs hormones travaillent pour cela.
Faire l'amour crée toujours de l'attachement
Je me souviens d’un couple qui s’était formé pour des raisons de proximité. Ils étaient colocataires et de fil en aiguille, avaient fini par avoir des relations sexuelles régulières. Ils ne se plaisaient pas tant que cela physiquement et ne se sentaient pas en connexion sur le plan des caractères. Mais quand ils ont finalement voulu se séparer, cela s’est révélé extrêmement douloureux pour tous les deux. En faisant l’amour régulièrement, ils avaient créé un fort attachement. Il ne faut donc jamais sous-estimer le pouvoir de la sexualité sur les sentiments.
Faire l’amour, c’est encore entretenir l’amour. Dans un couple qui dure, le sentiment amoureux est fluctuant. Ce n’est jamais un long fleuve tranquille. On s’aime à la folie, et par moments, on s’aime tranquillement, doucement, parfois, puis on s’éloigne un peu, on se retrouve, on se sent à nouveau très amoureux. Et puis, il faut savoir (et on ne le sait pas suffisamment) qu’il arrive forcément, pour un temps quand un couple dure… que l'on ne s’aime plus. Et pourtant, on reste ensemble, parce que, dans notre sagesse, on sait que ces moments de désamour sont inévitables. Et que l’amour revient.
Dans ces moments où le sentiment amoureux est évaporé, continuer à faire l’amour est essentiel, cela permet de rester proches physiquement, de se donner du plaisir mutuellement, d’alimenter l’attachement, de continuer à tisser le lien et d’agir comme on le ferait pour une plante qui a soif : on l’arrose. En faisant l’amour, on nourrit à nouveau l’amour qui va refleurir. Bien sûr, la sexualité n’est pas la seule manière de réactiver l’amour : les attentions à l'autre, les paroles valorisantes, les pensées positives volontaires envers l’autre, les moments de plaisir partagés quels qu’ils soient, les projets faits ensemble, beaucoup d’autres éléments peuvent alimenter l’amour.
Attirance, respect et plaisir partagé
«Avoir un rapport sexuel» n'est pas tout à fait équivalent. Une rencontre sexuelle n’implique pas forcément de l’amour. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de positif à en retirer. Même sans amour, il peut rester de l’attirance, du respect et de l’attention, ainsi que du plaisir partagé. Cela peut être une belle rencontre. Je me souviens d’un cas étonnant rapporté par un collègue. Un de ses patients qui n’avait jamais eu de relation sexuelle a passé une annonce, et une femme a accepté, car elle non plus n’avait jamais eu de relation sexuelle. Ils se sont entraidés et sont devenus amis sans jamais s’être sentis amoureux. Et ils sont restés très reconnaissants l’un envers l’autre.
Certains adolescents choisissent ainsi leur premier partenaire non par amour ou attirance, mais pour la confiance qu’ils éprouvent pour cette personne. Cela peut sembler dommage, mais cette première fois peut être vécue comme une expérience positive.
Inversement, un rapport sexuel peut être très négatif, un geste entièrement égoïste, où l’on considère l’autre uniquement comme un objet destiné à vous procurer du plaisir, un objet parfois même méprisable. Et dans ce cas, cette relation, même brève, peut devenir destructrice pour l’un des deux partenaires qui se sent utilisé. Cela peut aller loin. J'ai entendu une patiente me confier se sentir «comme une prostituée gratuite » sur l'application de rencontre Tinder.
La complexité du couple
Mais dans la vie, rien n’est jamais tout à fait tranché. L'amour et la sexualité sont complexes. Il arrive dans une même relation de couple de «faire l'amour», d'être dans le partage, ou d'avoir simplement un rapport sexuel très égoïste. Personne n’est parfait, et l’on ne se situe pas toujours émotionnellement dans un état amoureux.
Il est également naturel que l’autre soit aussi un « objet de désir », et pas seulement un sujet d’amour. Ainsi, pendant une relation sexuelle, chacun peut passer de la concentration sur son propre plaisir, moment où l’on ne pense guère à l’autre, à des moments d’attentions et de don généreux où l’on ne pense plus à soi, mais au plaisir de l’autre, des moments où l’on accepte de jouer à être un objet pour l’autre, à des moments d’amour tendres.
Un de mes patients l’a illustré d’une très jolie manière en me disant : «avant, quand j’avais un rapport sexuel, c’était mon sexe qui prenait du plaisir, maintenant, c’est mon sexe qui donne de l’amour. Ce n’est pas du tout la même chose. Et je ne veux jamais revenir en arrière.»
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L’article de Catherine Solano -consœur dont je peux personnellement témoigner de la qualité- á au moins le mérite d’exprimer du bon sens dans un monde en proie au vent se folie sociétale que nous subissons. Merci Catherine.
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Manger et bouffer. La même différence.
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Le sujet préféré de Catherine Solano, mais son texte est trop long. Qu'elle nous l'explique plutôt en BD !
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