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https://www.lemonde.fr/le-monde-des-religions/article/2022/11/01/docteur-christophe-faure-il-se-degage-une-vraie-sagesse-des-recits-d-experience-de-mort-imminente_6148074_6038514.html

Propos recueillis par

Publié aujourd’hui 1.11.22

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La science a-t-elle son mot à dire sur l’au-delà ?

Oui, répond le psychiatre Christophe Fauré, dans un livre déroutant. Le médecin, qui s’intéresse aussi au bouddhisme (notamment depuis sa retraite de deux ans dans un centre du bouddhisme tibétain en Dordogne entre 2001 et 2003), s’était déjà longuement penché sur la question du deuil, à travers différents ouvrages. Dans Cette vie… et au-delà. Enquête sur la continuité de la conscience après la mort (Albin Michel, 368 pages, 21,90 euros), qui paraît le 2 novembre − Jour des morts dans la tradition catholique −, il dresse cette fois-ci un état des lieux des avancées de la recherche sur plusieurs types d’« expériences de l’au-delà » vécues à travers le monde par des centaines de milliers d’individus.

Les plus connues sont les expériences de mort imminente (EMI), expression désignant un ensemble de visions et de sensations vécues après un accident, un arrêt cardiaque ou pendant un coma, par exemple. Si toutes les EMI ne se ressemblent pas, de nombreuses personnes racontent avoir vécu la même chose : une sortie du corps, une rencontre avec des êtres mystérieux très majoritairement bienveillants (parfois décrits comme des « êtres de lumière ») et/ou des proches défunts, un « tunnel » dont on a la sensation qu’il conduit quelque part d’où l’on ne revient pas, etc.

Ces récits ont été compilés et analysés par des dizaines de scientifiques – psychiatres, neurologues, biologistes, spécialistes de soins palliatifs –, en particulier dans les pays anglo-saxons. Et il ne faut pas s’arrêter là, avance Christophe Fauré dans un entretien au Monde des religions, et « mettre de plus en plus de science dans ce domaine, pour ne pas le laisser aux fondamentalistes religieux ».

Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser à ces questions ? Est-ce votre regard de psychiatre ou d’homme tourné sur le bouddhisme qui vous a conduit vers ce sujet ?

J’ai avant tout écrit ce livre avec une attention de médecin. La parution en 1975 de l’ouvrage de Raymond Moody (médecin connu pour ses travaux sur les EMI), La Vie après la vie, avait déjà attisé ma curiosité. Mais je n’ai pas particulièrement d’attrait pour l’extraordinaire et c’est vraiment par la pratique que je me suis intéressé à ces questions et que j’ai eu envie de les creuser.

Au fil du temps, par mon métier de médecin, notamment en soins palliatifs, j’ai rencontré de plus en plus de malades en fin de vie, infirmières, proches de défunts, patients ayant vécu des EMI, personnes en deuil, etc. qui m’ont apporté des témoignages directs sur ce type d’expérience.

La science est en train de changer de paradigme, de sortir d’une vision matérialiste

Evidemment, ces témoignages font écho au volant bouddhiste de mon parcours, qui reste très présent. C’est intéressant de voir que des éléments de traditions spirituelles entrent en résonance avec des expériences humaines qui peuvent être abordées d’un point de vue scientifique, avec non plus des anecdotes rapportées ici ou là, mais des milliers de données, analysables, quantifiables, que l’on peut croiser.

Je me suis aussi aperçu qu’il y avait un énorme gouffre entre la connaissance anglo-saxonne sur ces sujets et ce que l’on en sait dans les pays francophones. J’ai voulu transmettre ces connaissances en vulgarisant assez pour que ce soit accessible.


Je pense que la science est en train de connaître un changement de paradigme, de sortir d’une vision matérialiste qui poserait par exemple pour acquis que la conscience ne peut être que le produit de l’activité neuronale. Ce paradigme connaît des fissures avec, par exemple, la physique quantique. Mais cette dernière n’intéresse malheureusement pas beaucoup le grand public, alors que les expériences que je relate dans mon livre interpellent tout le monde.

Vous affirmez que ces expériences peuvent « avoir des incidences pour notre vie ». Que voulez-vous dire ? Que peuvent-elles nous apporter ?

Tout d’abord, il y a un intérêt pour les personnes qui les vivent. En tant que psychiatre, je sais combien cela peut prendre du temps de changer les habitudes de quelqu’un. La première chose qui m’a marqué avec ces expériences, c’est la rapidité et la radicalité avec laquelle elles peuvent changer la vie de ceux qui les vivent.

Dans leur grande majorité, elles sont vécues très positivement. Les personnes y trouvent une source d’apaisement, d’énergie, cela atténue leur peur de la mort et renforce leur envie de vivre, en étant plus présentes, plus curieuses, plus tournées vers les autres. C’est ce qui les distingue de ceux qui ont « simplement » frôlé la mort, plus enclins à des troubles anxieux, à du stress post-traumatique et qui souffrent davantage.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés De la mort digne à la fin de vie, une histoire de l’agonie

Ensuite, je pense que les médecins doivent pouvoir être en mesure de parler de ces expériences avec leurs patients lorsqu’ils les vivent. Pour le patient, c’est extrêmement rassurant de se dire qu’il n’est pas fou, que ce qu’il vit correspond à quelque chose, partagé par des milliers d’autres personnes à travers le monde.

Mais je considère également que ces expériences peuvent être inspirantes pour tout le monde. Elles apportent de nouvelles grilles de lecture sur la vie et incitent à se demander : que signifie être dans cette vie ? Quel est le sens de cette vie ? Quelle est la nature de notre conscience ? Ce sont des choses très concrètes.

Pouvez-vous citer des exemples concrets, justement ?

Environ 14 % de ceux qui vivent des EMI connaissent ce que l’on appelle une « revue de vie ». Ils sont alors mis face à un panorama de ce qu’ils ont vécu et perçoivent, de manière très nette, parfois à travers des détails totalement oubliés, l’impact de leurs paroles, de leurs pensées, de leurs actions, sur eux-mêmes et sur les autres. On peut tous s’en inspirer pour méditer sur les conséquences de nos actions, même celles qui peuvent nous paraître insignifiantes.

Il y a dans ces récits des messages d’amour, d’amour de soi, des autres, du vivant

Autre exemple : un nombre conséquent de gens s’entendent dire, lors d’une EMI, que le moment de leur mort n’est pas encore venu. Cela nous montre que, dans cette vie, il y a des choses à faire, qu’elle peut avoir un sens. La vie n’est pas juste absurde. Il y a une vie à vivre avec toute sa beauté, sa richesse. Nombre de récits de ces expériences (et des changements qu’elles ont entraînés dans la vie des patients) comprennent des messages d’amour, de prise en compte de soi, d’amour des autres, de prise en compte du vivant, de la planète.

Je trouve qu’il s’en dégage une vraie sagesse. L’être humain, fondamentalement, est en quête de sens. Nous cherchons tous à trouver des boussoles. Evidemment, chacun est entièrement libre de se laisser influencer, toucher, porter ou non, par ces récits. Mais j’y vois pour ma part des clés extrêmement profondes pour aborder la vie, sans être portées par des dogmes religieux, par une morale du bien ou du mal.


Il faut souligner que l’immense majorité des personnes qui ont vécu ces expériences assurent qu’elles n’y ont été jugées par personne, ni en bien ni en mal. Elles tirent elles-mêmes leurs propres conclusions. C’est vraiment de l’ordre du libre arbitre.

Dans votre ouvrage, le conditionnel reste de mise. Si vous ne remettez jamais en cause l’honnêteté de ces témoignages, vous vous gardez d’affirmer que cela prouve la continuité de la conscience après la mort. Pouvez-vous nous expliquer la nuance ?

Je fais la comparaison avec le droit : un juré peut avoir une intime conviction, mais s’il n’a pas fait l’expérience directe du meurtre, il ne peut se baser que sur des témoignages. Or, mon livre ne se base pas sur une expérience directe. C’est pourquoi le conditionnel restera toujours de mise

Mais c’est vrai qu’il existe des témoignages vraiment surprenants. Par exemple, certaines personnes affirment avoir vu, lors de ces expériences, d’autres personnes, alors qu’elles ne les savaient pas décédées. Parfois, elles vivent des « expériences partagées » avec des gens qu’elles ne connaissent pas. Citons également les récits de ces enfants qui semblent se souvenir de vies antérieures, en évoquant leur « autre maman » ou en donnant des détails de leur enterrement. Cela tendrait à faire croire à une continuité de la conscience après la mort. Mais on ne pourra jamais avoir de certitude sans expérience directe.

Est-ce que ça ne risque pas de heurter certaines croyances religieuses ? Un théologien pourrait vous dire qu’il ne faut pas prendre ces questions à la légère…

Certains fondamentalistes, notamment aux Etats-Unis, voient effectivement dans ces témoignages l’action du diable. Selon moi, ces personnes veulent imposer une autorité, un dogme, dans le rapport à la mort et à l’au-delà. Je ne suis pas théologien, je ne sais pas répondre à leur place. Si un théologien trouve qu’il est dangereux qu’une personne change l’axe de sa vie dans un sens bénéfique pour elle-même et pour autrui, ce sera sa conclusion.

L’idée n’est pas d’aller contre les neurosciences mais d’en élargir le champ

Nous sommes libres de nous inspirer ou non de ces expériences. Je n’en parle pas dans mon livre, mais il est vrai que certaines ont entraîné de profondes crises existentielles chez des personnes très religieuses, car elles entraient en contradiction avec quelques-unes de leurs croyances. Elles s’attendaient à être jugées et/ou pardonnées mais il ne s’est rien passé de tel durant leur expérience, il y a simplement eu un sentiment de responsabilité. D’autres, au contraire, ont été renforcées dans leurs croyances. Mais c’est un territoire où je ne m’avance pas trop, c’est de la théologie.

Selon moi, il faut mettre encore davantage de science sur ces sujets pour ne pas les laisser aux fondamentalistes. Ce qui me passionne, c’est d’étudier en profondeur les transformations survenues chez les gens qui ont vécu ces expériences.

Qu’est-ce que cela induit chez eux ? Comment une diminution aussi soudaine et radicale de la peur de la mort est-elle possible ? Pourquoi cela modifie-t-il autant le rapport à soi-même et aux autres ? Qu’est-ce qui se passe pendant ces quelques minutes qui entraînent des orientations de vie aussi radicales ?

L’idée n’est pas d’aller contre les neurosciences, mais d’en élargir le champ pour essayer de comprendre, encore plus finement, comment la conscience fonctionne.

 

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https://news.yahoo.com/halloween-heats-stand-celebrity-costumes-231650338.html

 

 
 
 
 

CORRELATs

.... et M¨ÊMEmême temps...................

 

 

  • et ce même jour à U au Vésinet

 inclure photos

 

  • SAUF ce même jour au 18 ....les témoins de Jehowha ...

 

 

 

… En premier se sont présentées les deux personnes situées à l'extrême droite-extrême-gauche… puis Elles ont été rejointes par le couple du milieu…

La conversation a été très agréable… nous nous sommes bien amusés… la conversation était très animée… ils ont manifesté l'intention de me revoir, avant mon emménagement aux « eSSentielles »…

 

 

 

  • SAUF ce même jour pour l'homocoques....

 

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https://www.insolent.fr/2022/10/au-pays-des-reformes-impossibles.html

 

Dans notre précédente chronique nous ironisions sur la ferme volonté prêtée à Emmanuel Macron dans son projet de "réformer" les retraites

La gestion lamentable par les pouvoirs publics du blocage des raffineries et de la pénurie du carburant que la grève scandaleuse occasionne cet automne nous donne une idée de la détermination avec laquelle le gouvernement pourra imposer une éventuelle réforme des retraites.

Répétons d'abord qu'il ne faut pas se leurrer sur la valeur du mot "réforme" : on ne "réforme" pas l'Ecole nationale d'administration en la rebaptisant "Institut de la Fonction publique" ; on ne "réforme" pas vraiment l'archaïque "patente" devenue "taxe professionnelle" en 1975, ni en la transformant en 2010 en "contribution économique territoriale". Le principe reste ici le même, très lourd, pénalisant pour les petites entreprises artisanales.

Or, on disait autrefois de la France qu'elle adorait les révolutions et avait horreur des réformes. C'était certes déjà évidemment vrai au XIXe siècle. Et il n'est même pas impossible que la grande catastrophe que notre pays a connue à la fin du XVIIIe, et qui donna naissance en 1792 à la Première république, puisse s'expliquer précisément par ce tropisme, confirmé en 1830, en 1848, en 1870, et, depuis lors, à nouveau au cours du siècle écoulé.

Le mal vient donc de loin...

Une réforme authentique cela suppose en effet un pouvoir législatif et un pouvoir exécutif, séparés mais l'un comme l'autre, à la fois forts, cohérents et doués d'un minimum de savoir-faire.

Nous venons de constater en Angleterre, après l'expérience Liz Truss de 44 jours qu'une détermination purement idéologique clairement affirmée, cela ne suffit pas : portée par les adhérents de base du parti conservateur, l'éphémère locataire du 10 Downing street cochait toutes les cases doctrinales, mais elle ne possédait aucune des dispositions permettant de les mettre en pratique.

Mais quels qu'aient été les défauts et/ou les carences de Mrs Truss, au moins avait-elle manifesté durant toute sa carrière antérieure – comme parlementaire, élue d'une circonscription du comté rural de Norfolk depuis 2010 ; comme ministre à divers postes de 2014 à 2021 – certaines qualités politiques qu'on chercherait vainement chez nos dirigeants parisiens, hors-sol et hyper-diplômés.

Dès novembre 2016 certes l'actuel président Macron publiait un livre de 268 pages, parfaitement creux, sous le titre "Révolution". Il laissait alors entendre qu'il allait bouleverser nos régimes de retraite. On allait voir ce qu'on allait voir. Et on a vu, en effet.

Erreur fondamentale : le "maître des horloges" caressait l'idée d'une fusion des systèmes du privé et du public et de la suppression des régimes particuliers, dérogatoires et subventionnaires. Égalité intégrale ! Quoi de plus séducteur dans un pays, le seul sans doute parmi les 193 États représentés aux Nations Unies, qui fait figurer le mot Égalité dans sa devise nationale.

Il y avait donc de quoi faire : abolir les 12 (principales) différences pour la retraite entre le secteur public* et le secteur privé, autant se proposer d'accomplir les 12 travaux d'Hercule. Pour capturer la biche aux pieds d'airain, et autres exploits, son auxiliaire désigné s'appelait nécessairement Laurent Berger, la CFDT majoritaire dans le secteur privé adhérant aux principes de cette réforme qualifiée de "systémique".

Hélas les technocrates de Bercy se préoccupaient de longue date d'une tout autre "réforme", celle d'un report de 2 ans de l'âge [théorique] de la retraite afin de diminuer les déficits de nos "comptes sociaux". Qualifiée de "paramétrique" cette réforme-là braquait la CFDT, et vexait même Laurent Berger. Or, elle répondait à une urgence du point de vue des engagements européens, pris par un pays qui ne les a jamais tenus depuis 30 ans de traité de Maastricht, ce qui indispose évidemment nos voisins et partenaires. Parmi toutes les discordances franco-allemandes que l'on découvre ces temps-ci, en voilà une difficile à rectifier sauf à changer de mode de gouvernance.

Il fallait choisir, et, comme à son habitude, Macron n'a pas su choisir.

"En même temps" ! : une telle périphrase irritait déjà un personnage dont Brigitte Macron a sans doute entendu parler dans l'établissement jésuite où elle enseignait naguère. Ignace de Loyola en effet s'était fortement insurgé, en face d'une attitude ambivalente du type de celles de notre cher président. Il proclamait en latin "volo et nolo, non habitant in haec domo". Traduisons : "dans cette demeure ne sauraient cohabiter je veux et je ne veux pas". Cet homme du XVIe siècle était décidément bien loin de la Macronie.

Petite-chouette

 

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https://www.lepoint.fr/editos-du-point/nicolas-baverez/le-nouveau-choc-de-civilisation-31-10-2022-2495834_73.php

 

ÉDITO. On croyait la théorie de Samuel Huntington dépassée ; la guerre en Ukraine et la lutte contre le réchauffement climatique l’ont remise au goût du jour.

Par

Le fosse se creuse entre Orient et Occident notamment en raison d'une divergence demographique : l'Occident ne compte que 1,3 milliard de citoyens contre 3,6 milliards pour l'Orient (ici, la gare de Churchgate, a Bombay, en 1989, par Mitch Epstein).
Le fossé se creuse entre Orient et Occident notamment en raison d'une divergence démographique : l’Occident ne compte que 1,3 milliard de citoyens contre 3,6 milliards pour l’Orient (ici, la gare de Churchgate, à Bombay, en 1989, par Mitch Epstein).  © Mitch Epstein, avec l’aimable autorisation de Black River Productions, Ltd./Galerie Thomas Zander
 
 
 
 
La vie belle
Comment apprendre (ou réapprendre) à voir la vie en rose ? Comment retrouver le plaisir de jouir de l’instant ? Comment ne pas se l’interdire ? Souvent, nous nous interdisons de vivre aujourd’hui pour mieux espérer un hypothétique demain... D’où l'intérêt de lire les auteurs présentés dans ce hors-série.
 
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https://www.letemps.ch/opinions/femme-vie-liberte

 

CHRONIQUE. Les manifestations en Iran, femmes en tête, invitent à découvrir la nouvelle traduction en français du recueil «Une autre naissance» de la grande poétesse iranienne Forough Farrokhzâd

  — © Illustration: Hector de la Vallée pour Le Temps

Wikipédia, attention les débats

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Plus populaire et légitime que jamais, l’encyclopédie collaborative est le dernier champ de bataille des grandes luttes idéologiques du moment. «Libération» a parlé à une dizaine d’administrateurs francophones du site, qui racontent les coulisses.

par Guillaume Gendron

publié le 30 octobre 2022 à 19h46
 

Chaque matin, thé fumant à la main, Sylvie (1) s’assoit devant son ordinateur et entame sa «patrouille», comme on dit chez les «wikipédistes» aguerris. Prolifique contributrice, cette retraitée de l’éducation nationale vérifie que les pages dédiées à ses marottes n’ont pas été «vandalisées» dans la nuit, guettant les germes des «guerres d’édition» de demain. Puis, elle se rend sur le «Bistro», le forum des rédacteurs, et suit «le grand drama de Wikipédia».

Ces derniers mois, le cœur de la sexagénaire n’y est plus : trop de polémiques et des évolutions qui l’inquiètent. Le Bistro est désormais aussi agité qu’un plateau de débats télévisés. C’est pour ça qu’elle ne veut même pas qu’on donne son pseudo Wiki : «La moindre phrase y est décortiquée.» Sylvie n’aime pas le manichéisme mais voit se dessiner deux camps : «Les militants et les pépères.» Elle se range dans la seconde catégorie, «ceux qui fournissent le gros du travail !» Mais elle l’admet, il est fini le temps où s’investir dans Wikipédia était un hobby au mieux ignoré, au pire moqué.

 

L’encyclopédie collaborative est plus que jamais scrutée, critiquée, convoitée. Une citadelle en proie aux déchirements internes comme aux tentatives de manipulation externe, tant son influence est devenue prégnante. Pendant que les agences de com rivalisent de stratégies pour ripoliner les pages de leurs clients, l’extrême droite s’essaye à l’entrisme dans ce qu’ils appellent «Wokipédia». A l’inverse, des militants antiracistes et féministes dénoncent «un bruit de fond» réactionnaire dans les entrailles de l’encyclopédie. «Wikipédia est victime de son succès», conclut Sylvie.

Un méga-site d’actu

Victime, c’est à voir. Succès, c’est indéniable. Deux décennies après son lancement, la plateforme affiche une santé insolente. Cinquième site le plus consulté au monde avec 5,5 milliards de visiteurs uniques chaque mois et des dons en hausse constante, le drôle de projet de Jimmy Wales, entrepreneur de la Silicon Valley aux mœurs libertariennes (son premier coup dans la bulle internet était un site largement dédié aux photos X, qui financera l’ancêtre de Wikipédia), fait désormais figure de référence pour le grand public. Tant pour les personnalités vivantes, du despote octogénaire à l’actrice en vogue, que pour les plus obscurs événements historiques, le plus pointu des philosophes ou le plus exotique des coléoptères (sans compter le fichage exhaustif de tous les Pokémon).

Sur Google, peu importe la requête, l’article Wikipédia − parmi les 65 millions d’entrées existantes en 300 langues − est bien souvent le premier résultat. Retournement spectaculaire : dans les années 2000, lancer un «tu l’as lu sur Wikipédia» tenait du dénigrement, à l’époque où les fiches squelettiques étaient peu sourcées, méprisées par les universitaires, truffées d’erreurs ou de canulars. Désormais, cela vaut validation : si c’est sur Wikipédia, c’est sans doute vrai. Avec les enjeux − informationnels, réputationnels, démocratiques même − qui en découlent. Durant la pandémie du Covid-19, de nombreuses publications, y compris scientifiques, ont salué le travail contre la prolifération des fake news effectué par les wikipédistes, main dans la main avec les pouvoirs publics.

A l’échelle française, Wikipédia compte 30 millions de lecteurs par mois, ce qui en fait, au-delà de son statut encyclopédique, le site d’infos le plus lu de France. Car, loin de ses principes originels de recul, la plateforme s’est mise à coller à l’actualité en temps réel. Avec le risque de dérapages que cela induit. Deux exemples parlants : une longue page «Affaire Lola» a été échafaudée dans les quarante-huit heures suivant le meurtre de la jeune parisienne de 12 ans. Et lors des dernières législatives, un utilisateur s’est empressé d’amender la page de la députée insoumise à peine élue Rachel Keke, ex-femme de chambre, pour préciser : «Le soir de son élection, elle a des difficultés à s’exprimer en direct à la télévision.» Si l’ajout malintentionné a été supprimé rapidement, il illustre désormais le tempo à lequel sont soumis les gardiens du Wiki-temple, à l’heure où le moindre parlementaire a sa fiche. Au risque de transformer les contributeurs en faits-diversiers ou chroniqueurs politiques…

«L’actualité, on s’est fait un peu piéger là-dessus, constate Pierre-Yves Beaudouin, chargé du plaidoyer de Wikimédia France, l’un des “chapitres” de la fondation qui chapeaute le développement de l’encyclopédie. Le lecteur comme la communauté attendent désormais qu’on soit le plus à jour possible. Les audiences sont énormes sur les morts célèbres, les conflits en cours, les élections. Le décès d’Elizabeth II a fait doubler le trafic mondial de Wikipédia ! Cette responsabilité-là stresse un peu la communauté…»

Des shérifs

La communauté Wiki, c’est quoi au juste ? Est-ce le troll de passage, l’amateur éclairé, le rédacteur de niche, le pamphlétaire monomaniaque, le super geek aux dizaines de milliers d’interventions ? Qui fait Wikipédia ? En principe, n’importe qui avec une connexion internet. C’est le miracle participatif : le clapotis des ajouts, soustractions et corrections permanentes d’un océan de curieux produit une connaissance souvent plus solide qu’un comité de sachants. Mais dans les faits, certains contributeurs sont plus égaux que d’autres, pour paraphraser Orwell. Il s’agit des «administrateurs». Des bénévoles cooptés parmi les rédacteurs les plus actifs, dont la nomination se fait sous la forme d’un plébiscite public où chacun doit motiver son vote, fidèle au culte de la transparence logorrhéique de la plateforme. Avec leur étoile de shérif, les «admins» sont censés se dédier à la maintenance du site, à l’affût de toute «activité vandaloïde» (savoureux jargon wikipédien), épaulés par les «patrouilleurs» et des bots. Mais si les algorithmes dégomment aisément gros mots et pénis potaches, ils sont impuissants face au POV pushing (littéralement «point de vue forcé»), soit toute tentative de perversion du sacro-saint principe de neutralité.

Pour résoudre les disputes (elles aussi publiques, visibles dans l’onglet «discussion» de chaque article), les admins peuvent verrouiller ou supprimer des pages et bloquer les fauteurs de troubles. «On fait la police», résume «JohnNewton8», quadra bordelais qui se définit comme un cadre sup et ne veut surtout pas voir ses «outils techniques» comme un pouvoir. «On n’impose rien sur le fond, précise-t-il. On dit juste : “Mettez-vous d’accord, sans menaces, ni insultes, ni manipulation des sources, sinon on vous bloque.» Environ 150 pour l’ensemble du Wikipédia francophone, dont le noyau dur compte entre 5 000 et 20 000 rédacteurs réguliers, ils ne sont qu’une trentaine à se colleter «les sujets chauds, compliqués, où ça ferraille sec». Qu’il s’agisse du conflit israélo-palestinien ou, plus étonnement, de l’huile d’argan (où se rejoue la brouille Maroc-Algérie), en passant par la vie et l’œuvre de Marlène Schiappa ou la fiche du bataillon ukrainien Azov (nazis ou pas ?)… «Ce qui bouge c’est la matière vivante, les conflits comme les personnes… L’article de Louis XI est stable», note JohnNewton8. Pour certains intronisés depuis une dizaine d’années, à l’instar de Jules, chauffeur de trains dans le civil et célébrité à l’échelle Wikipédia, ces admins postés sur la ligne de front essuient le feu des critiques.

De fait, derrière l’idéal d’horizontalité et d’autogestion, Wikipédia a accouché d’une sibylline hiérarchie prêtant aux comparaisons kafkaïennes éculées. Des blogs de révoltés en guerre contre «l’aristocratie wikipédienne» décrivent ainsi dans d’interminables posts «l’élection stalinienne» de tel admin ou l’aveuglement complice d’un autre, quitte à verser dans le doxxing, le déballage d’éléments intimes permettant d’identifier les quidams derrière les pseudos. Un véritable panier de crabes. Soupir de JohnNewton8 : «Facile de s’en prendre à nous : on prend les décisions qui fâchent. De là à imaginer qu’on est une clique ! On vient de tous bords, et on ne s’aime pas tous !» Jean-Noël Lafargue, enseignant en nouveaux médias et ex-admin tempère : «C’est un milieu où des gens ont quitté la communauté à cause d’une engueulade sur les chicons et les endives [le conflit sur le titre de la fiche dédiée à la chicorée dure depuis 2005, ndlr]. Les guerres d’édition génèrent beaucoup de frustration, mais comme tout organisme, Wikipédia a besoin d’anticorps…»

Pour «Sammyday», autre admin, «le niveau de violence n’est pas plus haut qu’avant, mais plus récurrent. Wikipédia est percuté par l’époque : le monde est plus polarisé, l’encyclopédie aussi. Tout devient épidermique». Au fil d’incessantes batailles plus ou moins futiles, la communauté a tenté de se trouver des arbitres. En vain. Les brigades de «Wikipompiers» ont été dissoutes et le Comité d’Arbitrage est en état de mort cérébrale, faute de volontaires. «On a un problème structurel d’absence de véritables médiateurs, concède Capucine-Marin Dubroca-Voisin, présidente de Wikimédia France. C’est un rôle dur, chronophage : plonger dans des discussions très longues, de façon écrite, et mettre sa réputation en jeu. Même quand on est admin, il est beaucoup moins risqué de faire du blocage de vandales dans son coin que de résoudre les conflits qui s’enveniment. Tout cela pèse sur la santé communautaire.»

Un loup zemmourien dans la bergerie

Ce climat délétère a été alimenté par une année 2022 émaillée d’«affaires» wikipédiennes. Il y a d’abord eu, en pleine campagne présidentielle, la révélation par Vincent Bresson, journaliste infiltré dans l’équipe de campagne d’Eric Zemmour, d’une cellule baptisée «WikiZédia», dont l’objectif était de lustrer les pages dédiées au polémiste, à son parti et à ses soutiens (l’enjeu n’était pas négligeable, la page Zemmour étant la plus visitée de France en 2021). Le groupuscule d’une dizaine de membres, chapeauté par Samuel Lafont, couteau suisse numérique de la fachosphère, s’appuyait sur «Cheep», pilier du Wikipédia francophone depuis une dizaine d’années. «C’était quasiment le plus gros contributeur de la partie politique, il jouissait d’une grande légitimité, moulé dans le style ultra-procédurier du site», raconte «Malaria28», bête noire de la bande WikiZédia, qui a depuis quitté la plateforme. Fort de son statut «autopatrolled», réservé aux gros contributeurs, Cheep voyait ses modifications validées automatiquement. Jusqu’à légender, en pleine polémique zemmourienne, une photo de Pétain et Laval en indiquant que leur «responsabilité dans la Shoah en France est sujette à débat». Si la grossière modification négationniste avait attiré l’attention, Cheep s’en était tiré avec un blâme, pas même un blocage. A la différence de Malaria28, aux interventions jugées trop virulentes.

«Le problème avec Cheep, c’est qu’il savait faire, explique JohnNewton8. Prises une par une, ses interventions étaient dans les clous, au regard de nos principes.» Au premier rang desquels, le «SBF» (supposez la bonne foi). En février, après la publication du livre de Bresson, Au cœur du Z, les administrateurs bannissent Cheep et six autres comptes. Sanction rarissime, à la hauteur du traumatisme, pour une communauté de fins limiers qui se vantait, jusqu’alors, de démasquer aisément «faux nez» et autres communicants masqués : il existe même une page sur le mode name and shame consacrée à toutes les tentatives d’«instrumentalisation et ripolinage de Wikipédia».

«Ce qui a été mal vécu, c’est que ça sorte dehors. On n’a pas su le voir, Cheep a su bénéficier de la mansuétude réservée aux anciens», reconnaît un admin. Pour ce dernier, Cheep n’était pas un cheval de Troie mais «un mec qui a retourné sa veste en reniant nos valeurs pour faire du militantisme. On accueille tout le monde, de la personne trans au vieux facho qui écrit des kilomètres sur Maurras − tant qu’ils s’en tiennent aux règles et aux sources». Wikimédia France a pris soin de préciser que le bannissement n’avait «rien à voir avec l’idéologie […] Cheep était notoirement connu pour être d’extrême droite», mais avec la violation d’une dizaine de commandements («neutralité», «savoir vivre», «conflit d’intérêts», utilisation de «pantins»).

Pris la main dans le sac, Lafont, le conseiller zemmouriste, hausse les épaules : «L’échec, il est de leur côté, pas du nôtre. Ils ont révélé à tout le monde qu’ils étaient une petite bande de militants. Qu’ils soient douze à faire la loi, on s’en fout. La question, c’est est-ce qu’ils penchent d’un côté ? Là, on l’a bien vu.» Dans une veine plus victimaire, Jean-Luc Coronel de Boissezon, ce professeur de droit révoqué par la fac de Montpellier pour avoir fait le coup de poing contre des manifestants étudiants en 2018, a réagi à l’exclusion de Cheep avec une tirade sur Twitter contre le «terrorisme intellectuel» que ferait régner sur l’encyclopédie «une poignée de geeks d’ultragauche haineux, caricaturaux, no life (sic) subventionnés». Au passage, Coronel de Boissezon, soupçonné de trafiquer sa page pour noyer sa condamnation à six mois de prison dans les tréfonds de sa notice, listait ses préconisations : «Ne jamais donner un centime [à Wikipédia]», «créer un compte et participer le plus fréquemment possible» et «encourager tout projet alternatif». Soit les deux grandes stratégies de la frange réactionnaire face à l’encyclopédie : l’entrisme ou la sécession.

Terre de croisades ?

Dans les sphères francophones, la première approche a été théorisée à l’aube des années 2010 par les sbires d’Alain Soral. Stéphane Condillac, le «monsieur Internet» du bretteur antisémite multicondamné, avait alors pondu un mode d’emploi pour une cellule d’une douzaine de personnes. Nombre «parfaitement suffisant […] [car] les débats contradictoires, voire les votes, mobilisent rarement plus de 10 ou 20 personnes», à condition de se plier à une «organisation très stricte voire militaire» pour tromper les administrateurs, «des geeks un peu flic». Plus récemment, on trouvait sur le site d’une officine catho-royaliste un appel reprenant ces consignes sous la bannière «Au nom de la vérité, investissons et conquérons Wikipédia !». Parmi les conseils, choisir «un pseudonyme discret, évitez les NouvelleCroisade et autres Vive-LouisXX» et faire ses preuves sur des sujets «non polémiques», type «bande dessinée, zoologie, l’église de votre village». Mais le but affiché était bien de peser, in fine, sur les pages les plus sensibles, comme celle consacrée à la théorie raciste du «grand remplacement». Cette dernière, champ de bataille permanent, a été placée depuis 2020 sous «semi-protection pour une durée indéfinie». En clair, les administrateurs ont posé un gros cadenas dessus, et sont désormais les seuls à pouvoir y intervenir. Un cas unique en français.

Il n’existe qu’un pays où l’infiltration droitière a fonctionné : la Croatie. Repérés par les médias locaux dès 2013, les biais ultranationalistes de cette déclinaison de l’encyclopédie étaient liés à la «mainmise d’un groupe qui a eu recours à des manœuvres d’intimidation et à des actions concertées pour acquérir du pouvoir au sein de la communauté wikipédienne», selon un rapport de la Fondation Wikimédia, publié en 2021. Il aura fallu près de dix ans pour que les membres de l’escadron, mené par un journaliste d’extrême droite, se voient privés des galons d’administrateurs qui leur permettaient de bloquer leurs opposants. «Aucune des différents Wikipédias n’est à l’abri d’une telle attaque», ont prévenu les analystes.

Les clones réacs, de «WikiKto» à «Conservapedia» aux Etats-Unis, ont quant à eux tous échoué, abandonnés faute de contributeurs ou macérant à l’état d’ébauche. «Faire son propre truc, ça ne marche jamais, concède Lafont. C’est comme dire, on va battre Amazon ! Faut être réaliste, ou avoir de sacrés moyens…» Dernière tentative en date, et pas des moindres : «Runiversalis», doublon de l’encyclopédie approuvé par les autorités russes fin août et «nettoyé» de toute mention de la guerre en Ukraine (fichée «Petite Russie»). Après avoir estimé que Wikipédia violait ses lois bâillons en colportant des «fake news de l’étranger», le Kremlin semble décidé à passer à la vitesse supérieure. Avant de bloquer l’accès à Wikipédia pour de bon ? Dans le doute, des utilisateurs ont commencé à en télécharger l’entièreté sur leurs disques durs…

La baston des sources

Sur Wikipédia, le nerf de la guerre, ce sont les sources. Et avec ce pivot inconscient vers l’actu chaude, celles-ci sont majoritairement journalistiques, loin de la vénération des thèses universitaires des débuts. Cette obsession de la «source secondaire fiable» (dans la philosophie Wikipédia, comme le veut un exemple célèbre, Philip Roth n’était pas une source d’autorité sur l’œuvre de Philip Roth, disqualifié comme une «source primaire») se frotte à l’épineuse définition de la neutralité des médias. «Un débat quotidien», confirme Jules, l’administrateur à l’origine de l’Observatoire des sources de la version française de Wikipédia, lancé en 2020. «Sur les pages liées au Covid et aux pseudosciences, le POV pushing était tout le temps lié aux mêmes sources, d’où l’idée de fixer la position majoritaire», justifie Sammyday. Ainsi, Valeurs actuelles n’est à utiliser qu’en «complément» et avec «proportion» (comprendre parcimonie), France Soir est un «blog complotiste» et Boulevard Voltaire «peu fiable». De l’autre côté du spectre, le Bondy Blog «est proche de revendications communautaristes musulmanes selon certains observateurs, tandis que d’autres sources y voient un média de qualité». Les médias «mainstream», dont Libération, ne font même pas partie de l’index, considérés de facto fiables. Fin septembre, c’était au tour des wikipédistes anglophones de décider si Fox News était une source acceptable. Au terme d’une discussion longue comme un roman (82 000 mots), un «consensus», valeur cardinale de l’encyclopédie, a été esquissé : les contenus liés au conglomérat ultraconservateur sont «marginalement fiables».

De quoi faire hurler les médias ostracisés, pour la plupart très à droite, qui reprennent en chœur les diatribes de Larry Sanger, éphémère cofondateur de Wikipédia. Véritable cerveau aux origines de l’encyclopédie (Jimmy Wales se chargeait plutôt de la partie tech), cet enseignant en philosophie a quitté le navire au bout d’un an, avant de lancer Citizendium, un anti-Wikipédia d’experts avec comité de lecture. Au fil des ans, Sanger a réécrit l’histoire, estimant avoir été évincé par «des anarchistes d’extrême gauche persuadés que [son] rôle [scientifique] posait problème». En 2021, sous les vivats de l’alt-right, il n’avait plus de mots assez durs contre son bébé. «Personne ne devrait faire confiance à Wikipédia !», tonnait-il dans le Daily Mail, déplorant qu’on ne pouvait plus y citer le tabloïd, ni Fox News : «Si une polémique n’apparaît pas dans les médias mainstream de centre gauche, elle n’apparaîtra pas dans Wikipédia.»

Conservateurs malgré eux ?

Mais les flèches pleuvent aussi depuis la gauche. Cet été, une dispute savante sur Wikipédia s’est retrouvée dans le Canard enchaîné. Bloqué définitivement sur le site, l’historien Damon Mayaffre, alias «Histors», assure avoir été victime des machinations d’un universitaire rival, le très conservateur Olivier Dard, qui sévirait sous le pseudo «Guise» (ce que le professeur à la Sorbonne, contacté par Libération, dément fermement). Tout commence sur une obscure page, celle des «Deux cents familles», en référence aux principaux actionnaires de la Banque de France jusqu’à sa nationalisation après-guerre. «Mythe politique» et «thèse complotiste», indique le résumé introductif de Wikipédia. Définition révisionniste et droitière, s’indigne Mayaffre, pour qui «un virulent débat intellectuel qu’on avait dans les années 70 à la fac s’est déplacé sur Wikipédia. Là, on traite Léon Blum de complotiste, quand même !» Pendant près de trois ans, ses modifications ont été systématiquement retoquées par l’hyperactif et influent Guise. Par dépit, Mayaffre-Histors multiplie les entorses à la wiki-étiquette : création d’un «Caou» (compte à objet unique) ; volonté de divulguer l’identité de son contradicteur ; utilisation de «faux nez» (avatars secondaires créés pour simuler des soutiens)… L’intéressé reconnaît des «maladresses» mais maintient qu’il s’agissait de collègues et étudiants : «Ils ont même bloqué l’adresse IP de l’université de Nice ! Quoi que je fasse, j’étais suspect parce que je n’avais pas leurs codes.» Ce que confirme à demi-mot un vétéran : «Entre Wikipédiens, on se tient les coudes, ça peut donner une impression sectaire vue de l’extérieur. Dans cette affaire, Histors avait peut-être raison sur le fond, mais il n’a pas su le prouver selon nos principes.» Symptomatique, opine un bibliothécaire sudiste récemment promu administrateur : «On a du mal à recruter et former des gros contributeurs qui ne soient pas là pour défendre une cause. Ces milieux ont progressivement fait leurs armes sur Wikipédia et en connaissent désormais tous les rouages. La situation se complique, je suis pessimiste…»

Cet automne, la charge contre le supposé conservatisme wikipédien a été nourrie par deux textes. Dans le numéro d’octobre de la Revue du crieur (éditions la Découverte-Mediapart), Sihame Assbague, figure clivante du combat contre les violences policières, dénonce le traitement réservé sur l’encyclopédie aux militants antiracistes, à l’instar de Rokhaya Diallo, dont les fiches seraient «des listes à la Prévert de commentaires critiques, […] de citations tronquées ou surinterprétées». Au même moment, l’Obs publie une tribune dénonçant «le traitement que réserve Wikipédia aux personnes trans, non binaires et intersexes», signée par le philosophe Paul B. Preciado, l’écrivaine Virginie Despentes et la réalisatrice Céline Sciamma. La discorde porte principalement sur le refus des wikipédistes d’utiliser l’écriture inclusive, actée lors d’un vote sans appel en 2020, et le maintien des «dead names» (prénoms pré-transition) dans les fiches concernées. La communauté peine à accoucher d’une convention sur la question, tiraillée entre son credo de «ne pas nuire» et son idéal d’exhaustivité. L’ambiance très «boys club» du Bistro, qui n’est pas modéré, est aussi pointée du doigt.

«Communautaires, les questions du langage épicène et du genre ont pris un certain relief depuis deux, trois ans, euphémise l’administratrice “Esprit Fugace”. On s’y heurte à l’un des obstacles majeurs que rencontrent ceux qui voudraient pousser Wikipédia sur un angle plus socialement libéral : les règles de Wikipédia imposent de respecter les sources, issues de la société. Si la société est biaisée (et elle l’est), alors Wikipédia va inévitablement refléter ce biais, en digne miroir qu’elle est. Corriger les biais sociaux sur Wikipédia revient à en faire un miroir déformant, ce qui prend à rebrousse-poil une partie assez importante des contributeurs.»

C’est pourtant dans ce sens que souhaite aller la Fondation Wikimédia, dans le cadre de sa «stratégie 2030». Théoriquement, la maison mère basée à San Francisco n’intervient pas sur la partie éditoriale, chargée seulement de lever les fonds nécessaires au fonctionnement de l’encyclopédie (hébergement des serveurs, codage de l’interface, relations institutionnelles). Mais, abreuvée de dons − déjà 150 millions de dollars collectés sur les trois premiers trimestres 2022, de quoi couvrir ses frais, auxquels s’ajoute un matelas de 100 millions sous forme de dotation − la fondation aide désormais des projets visant à rendre la plateforme plus diverse, tant dans ses contenus que ses contributeurs, comme «Noircir Wikipédia» ou «les sans pagEs». Créée en 2017, cette association francophone entend combler le manque de biographies féminines, qui représentent moins de 20 % du corpus. Durant l’été, elle a annoncé sa décision de se «professionnaliser», en salariant Natacha Rault, sa fondatrice. Si les sommes en jeu ne sont pas mirobolantes (30 000 euros de subventions par an), toute une frange wikipédienne y voit une dérive, une forme de POV pushing sponsorisé. Voire un conflit d’intérêts, Capucine-Marin Dubroca-Voisin étant à la fois présidente de Wikimédia France et trésorière des «sans pagEs». «Deux poids, deux mesures ?» feint de se demander le Figaro en osant un parallèle avec l’affaire WikiZédia. «Nous ne sommes pas payées pour créer des articles, comme une agence de com pourrait l’être», assure Natacha Rault, pour qui «le débat est très légitime, mais pas les attaques personnelles, ni le harcèlement». Son salaire, dit-elle, lui permettra de se dédier aux tâches administratives en soutien à ce projet qui mobilise environ 200 bénévoles et de nombreuses institutions culturelles. «Ces suspicions de “militantisme” omettent le fait que la connaissance libre est un acte militant en soi : Wikipédia, par définition, est révolutionnaire», souligne Dubroca-Voisin.

Wikipédia est-il un «miroir de la société» ou la boussole de l’époque ? Un arbitre impassible ou un agrégateur de polémiques ? La neutralité du savoir est-elle la neutralisation des luttes ? Le bénévolat est-il l’assurance de la probité ? Vastes débats. Les wikipédistes vont devoir trancher, quitte à verser des litres de jus de crâne. Ils y sont prêts.

(1) Le prénom a été changé.

 
 
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Depuis quarante ans, aucun débat serein sur les riches n’a eu lieu, aucune distinction n’est opérée entre les rentiers et les entrepreneurs créateurs d’emplois, constate dans sa chronique Jean-Michel Bezat, journaliste au « Monde ».

Publié le 24 octobre 2022

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l flotte dans l’air un lourd parfum « antiriches », porté par une baisse de pouvoir d’achat catastrophique pour les plus modestes et un sentiment de déclassement social grandissant des classes moyennes. Du pavé des villes aux bancs de l’Assemblée nationale, les syndicats, les associations et les partis d’extrême droite et de gauche agitent de nouveau la figure honnie du « riche », bouc émissaire de la crise, exutoire par où s’épanche la colère. Jusqu’à des élus de la majorité présidentielle, qui ont voté il y a quelques jours une taxation des superdividendes. Au bout de la pique, la tête du PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a remplacé le chef du propriétaire de LVMH, Bernard Arnault, pourtant cent fois plus riche que lui.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Le clan Arnault ou la fabrique des héritiers

Le cas des patrons du CAC 40 n’est pas anecdotique. Parfois exorbitantes, leurs rémunérations (salaire, stock-options, retraites chapeaux et parachutes dorés…) ont suivi la financiarisation de l’économie amorcée dans les années 1980, quand la hausse du cours de Bourse et le retour aux actionnaires ont pris une place tout aussi exorbitante. La munificence des multinationales a porté ces « packages » jusqu’à 300 fois le smic et 100 fois le salaire moyen dans certaines sociétés, alors que la dispersion des rémunérations n’allait que d’un à vingt dans les années 1970.

Cette richesse a ruisselé sur le sommet de l’encadrement, sans descendre très bas, et ces écarts ne font qu’attiser régulièrement les tensions au sein des entreprises. Il a fallu que le feu social menace pour que le gouvernement s’en avise. Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, admet du bout des lèvres qu’il y a « un problème en France de partage de la valeur » et réclame des grands patrons une « “common decency” en matière de rémunération ». François Bayrou, président du MoDem, ne peut être en reste : « Le pays a besoin de signes de justice. »

Les ultrariches, figure repoussoir à usage politique

En quarante ans, le débat sur les riches a peu évolué. La formule du secrétaire général du Parti communiste français, Georges Marchais, qui jouait la surenchère face à François Mitterrand lors de la campagne présidentielle de 1981, est restée dans les mémoires : « Au-dessus de 4 millions [1,6 million d’euros actuels], je prends tout. » A la veille de la primaire socialiste chargée de désigner le candidat pour l’élection présidentielle de 2007, François Hollande lui faisait écho : « Je n’aime pas les riches, je n’aime pas les riches, j’en conviens. » Aucun débat serein n’a eu lieu, aucune distinction entre les rentiers de plus en plus nombreux et les entrepreneurs créateurs d’activités, d’emplois et de rentrées fiscales.

On sait ce qu’est un pauvre : un seuil a été fixé à 60 % du salaire médian, et 10 millions de Français vivent avec moins de 1 102 euros par mois (2 314 euros pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans), selon l’Insee. Il permet de cibler des prestations sociales destinées à tirer les plus modestes de la pauvreté. Rien de tel à l’autre extrémité du spectre social. C’est quoi, être un « riche » en France aujourd’hui ? La seule certitude est qu’il existe d’abord dans le regard de l’autre – souvent détesté, toujours envié. Et que ces passions tristes épargnent les stars du football, dont les salaires indécents ne sont que la captation de l’essentiel de la rente du ballon rond.

Les riches, alors ? Sont riches ceux qui disposent d’un niveau de vie après impôts supérieur à 3 673 euros par mois (5 790 euros à Paris) pour une personne seule ; ou d’un patrimoine d’au moins 490 000 euros par ménage, soit trois fois la médiane, définit l’Observatoire des inégalités. A cette aune salariale et patrimoniale, la France compte 4,5 millions de riches (15,5 % des ménages). Son directeur, Louis Maurin, met ainsi en garde contre une vision réduisant le débat sur les inégalités aux ultrariches, figure repoussoir à usage politique.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Selon l’Observatoire des inégalités, la France compte 4,5 millions de « riches »

« Penser que la répartition des richesses se résume au combat des 99 % d’en bas contre le 1 % du haut de la pyramide, comme le dit le plus souvent la gauche française, est démagogique », écrit-il dans son deuxième Rapport sur les riches en France, publié en juin 2022. L’homme, qui ne peut être soupçonné de complaisance pour les plus fortunés, estime que « derrière quelques PDG ultrariches, s’abrite une population qui montre du doigt l’étage supérieur des revenus, tout en profitant de l’insécurité sociale subie par les catégories populaires ».

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Un sentiment de dépossession de son existence

La stigmatisation des seules grandes fortunes relève de l’incantation politique, les mesures fiscales confiscatoires sapent la légitimité de l’impôt. Elles permettent de se donner bonne conscience à peu de frais et d’éviter de réformer la fiscalité, notamment sur les successions, pour freiner l’accroissement des inégalités par la transmission des patrimoines. Elle occulte surtout un autre phénomène, qui montre à quel point les inégalités monétaires ne sont pas l’alpha et l’oméga de la crise actuelle : le sentiment de dépossession de son existence.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Et si l’héritage n’allait pas de soi ?

Les réflexions de Louis Maurin trouvent un prolongement dans le dernier essai, cruel et incisif, du géographe Christophe Guilluy. Dans Les Dépossédés (Flammarion, 204 pages, 19 euros), la charge ne porte pas sur les patrons du CAC 40 ni les 1 % les plus riches, mais sur une catégorie cool-écologiste qui a subrepticement expulsé les classes populaires du cœur des métropoles, de certaines banlieues, du littoral Atlantique.

Guilluy dénonce cette « bourgeoisie “insoumise” qui peuple ces quartiers » et vote à gauche (y compris radicale). Elle n’a pas de mots assez durs contre les 1 %, le capitalisme et ses injustices, « mais elle quitte rarement son loft pour grossir les rangs des manifestants » contre l’expulsion sournoise des ouvriers et des employés de leurs lieux de vie. Comment imaginer que la contestation vienne de ceux qui ont fait la culbute grâce au boom de l’immobilier et qui, de surcroît, osent leur faire la morale écolo sur leur mode de vie ?

 

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https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/10/31/halloween-dans-le-monde-une-drole-de-celebration-americaine-accueillie-avec-scepticisme-en-france_6147967_4500055.html

 

Halloween dans « Le Monde », une drôle de célébration américaine accueillie avec scepticisme en France

Désormais banalisée dans l’Hexagone, cette célébration est évoquée pour la première dans le quotidien le 22 décembre 1950, avant de nourrir les pages cinéma, puis de susciter le débat par son aspect « mercantile ».

Publié aujourd’hui 31.10.22

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a toute première fois que Le Monde a écrit Halloween, c’était… à Noël. Le 22 décembre 1950, Christine de Rivoyre consacre un article à « Christmas en Amérique ». La journaliste s’étonne du « big business » de Noël outre-Atlantique : « Dès la rentrée des classes il s’est fait pressentir. A peine a-t-il attendu que les citrouilles d’Halloween, fête des fées et des garnements farceurs, se soient évanouies sous la brume d’octobre et dans un bruit de pétards (…). On achète, on achète, on achète. »

La fête d’Halloween n’est, tout au long des années 1950 et 1960, qu’un objet de curiosité très ponctuel pour le quotidien. Le 2 novembre 1953, Le Monde décrit à ses lecteurs cette drôle de célébration dans les rues de Washington : « Trick or treat, tel est le mot d’ordre que des millions d’enfants américains répètent depuis hier soir, frappant à toutes les portes, vêtus d’étranges oripeaux. »

Succès du film d’horreur

A partir des années 1970, le mot devient familier aux lecteurs des pages cinéma, imposé par le succès du film d’horreur Halloween. La Nuit des masques, dont Jacques Siclier écrit, le 30 mars 1979 : « L’impression d’angoisse est telle qu’on la ressent pendant tout le film. Sans une minute de défaillance, John Carpenter nous maintient sur la corde raide d’un suspense qui va se répéter », à savoir des meurtres commis le soir d’Halloween.

Le terme surgit parfois de façon inattendue. Dans un grand entretien paru le 7 mai 1984, l’écrivain argentin Jorge Luis Borges raconte s’être trouvé dans le Wisconsin un soir d’Halloween : « J’ai très peur des carnavals, j’ai peur des masques, mais j’étais là, dans cette université, et tout le monde se déguisait (…). Alors je me suis dit : “Je ne veux pas jouer les trouble-fêtes et je vais me déguiser.” De toute façon, ça n’allait durer que peu de temps. J’ai donc investi 2 dollars pour m’acheter une grande tête de loup, dûment hirsute, aux yeux effrayants, avec d’énormes crocs, etc. Je suis alors entré dans une salle où il y avait beaucoup de gens travestis, aussi terrifiants que moi, en hurlant “Homo homini lupus”, la phrase de Hobbes : “L’homme est un loup pour l’homme.” »

Au début des années 1990, la France ne s’intéresse encore guère à cette fête. Au point que le « jovial directeur général » du parc Euro Disneyland qui ouvre en 1992, Philippe Bourguignon, affirme, le 11 avril 1993 : « La plupart de nos visiteurs viennent se dépayser dans une atmosphère qu’ils veulent le plus authentiquement américaine. Mais fêter Halloween ne signifie pas grand-chose pour eux. Nous avons donc décidé de mettre l’accent sur des événements plus familiers pour les Européens comme la Saint-Jean, la Saint-Nicolas… »

Contre l’invasion des potirons

Mais trois ans plus tard, le 24 octobre 1997, le journaliste Jean-Michel Normand constate qu’il devient difficile, l’automne venu, d’échapper aux « citrouilles décorées ». Cette année-là, une nouvelle étape semble avoir été franchie. « Marks & Spencer vend des sucreries spéciales, Disneyland Paris se met à l’heure des revenants du 25 octobre au 2 novembre, le distributeur de jouets Toys‘R’Us fait de même et propose maquillages et déguisements… »

La trajectoire du mot « Halloween » dans les colonnes du Monde semble épouser celle de l’envol de la consommation de masse en France. Le 24 octobre 1999, la fête gagne encore du terrain en squattant les écrans de télévision, nous apprend Sylvie Kerviel. Le 3 novembre de la même année, le critique de cinéma Jean-François Rauger lance un rituel : l’article d’opinion contre cette « importation mercantile ». Tous les automnes, une plume du journal s’élève contre l’invasion des potirons… Exemple, le 27 octobre 2000 : « Halloween confirme que la mondialisation est une américanisation (…), écrit l’écrivain Jacques Gaillard. Imaginez-vous les petits Blanchard et les jeunes Dupont fêtant le Nouvel An chinois et croquant des loukoums dans les salles obscures ? »

Le journaliste du Monde Pierre Georges tranche le débat le 1er novembre 2000 : « Halloween a gagné ! K.-O. la mort (…). Les enfants ont choisi de s’offrir, délicieuse peur, de faire sa fête à la mort. Est-ce bien, est-ce mal ? Pas d’opinion, mon général ! Et encore moins l’envie de courir les villages et campagnes de France en jetant de lugubres et vengeurs : "Halloween go home !" »

L’Eglise semble affolée

Le lendemain, le spécialiste des religions dans Le Monde, Henri Tincq, prend le relais tant l’Eglise semble affolée face au succès de cette fête païenne : « Le vrai constat, à propos d’Halloween, c’est que l’Eglise a perdu le monopole de l’initiative festive et celui de l’approvisionnement en symboles religieux des fêtes collectives. » Un an plus tard, le 31 octobre 2001, la correspondante du Monde aux Etats-Unis, Sylvie Kauffmann, parcourt une Amérique meurtrie par le 11-Septembre : « L’humeur est à la sobriété : les décorations qui, chaque année à cette époque, assaillent porches, façades et jardins à travers toute l’Amérique sont cet automne réduites au minimum, voire inexistantes. »

En France, le débat Halloween ou Toussaint est, en 2002, désormais pris en charge par l’Eglise. « Entre les saints et les sorcières, la guerre est déclarée, annonce Henri Tincq le 2 novembre. Des jeunes catholiques devaient distribuer dans les rues de Paris, vendredi 1er, jour de la Toussaint, et samedi 2 novembre, jour des morts, un numéro spécial de Paris Notre-Dame, le journal du diocèse, avec en titre les mots “Holy Wins” et en illustration une croix transperçant une citrouille ! » « En 2002, 27 % des foyers français et 38 % des 15-24 ans envisageaient de fêter l’événement, détaille Laure Belot le même jour. C’est une fête qui n’est pas spécialement célébrée à Paris intra-muros mais qui touche plutôt les régions et la banlieue parisienne. »

Après l’affolement de l’Eglise, celui des Etats. Le 1er novembre 2005, Le Monde rapporte que le président vénézuélien Hugo Chavez s’en est pris à la fête d’Halloween, une « coutume satanique américaine » inspirée par le « terrorisme » et destinée à « effrayer les peuples ». Mais bientôt, le soufflé retombe. Du moins en France. Le 31 octobre 2006, Jean-Michel Normand parle d’un « sale temps pour les sorcières », confirmé par les professionnels.

Devenue suffisamment banale au cours de cette dernière décennie pour que plus personne ne s’alarme de sa popularité ou ne souligne, au contraire, son déclin, la fête d’Halloween est aujourd’hui l’occasion de recommandations culturelles et touristiques à destination des plus jeunes. En 2021, la journaliste Clara Georges dressait une liste de livres jeunesse « à lire à la lueur des lanternes, tapi sous la couette » et, cette année, Gladys Marivat recense les ateliers organisés dans des fermes d’Ile-de-France.

 

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.....à transmettre .....

 

 

Ensemble Aedes

- Messe pour double chœur a cappella -

 

 

Leçons de ténèbres de Michel Lambert

par Marc Mauillon

 

Dieu a tant aimé le monde _NV Worship

 

 

chant

d' 1 camp ou d' UN champs

?

https://homocoques.fr/2-articles/420-chants-de-nos-champs-face-aux-chants-des-camps

 

...quelles notes ...

...en nos chants et nos champs..

 

....nous devons nous engager dans la lutte pour la liberté et la recherche de la vérité ...

..EN même temps ....

 

" le N.O.M. " -EsT- " L'Apocalypse "

...il est temps ....

 

The Lumineers - "Flowers In Your Hair"

 

 

 

 

Homonymes

camps    champs

Homophone

 

GRAn-m-MERE

 

10 chansons sensuelles qui feront augmenter votre température au lit

Amy Winehouse - Rehab

Top 10 des chansons les plus hot de la chanson française

 

..... la Maladie n'est rien, le terrain est Tout .....

mon père

 

Le combat Antoine Béchamp -*- Louis Pasteur

 

 

 

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http://yvesdaoudal.hautetfort.com/archive/2023/03/04/resisterhood-6431358.html

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Ceci est aujourd’hui le charmant bandeau du site d’informations de l’Union européenne EUobserver.

Resisterhood, contraction de « sororité résistante », est dédié aux « luttes féministes pour la révolution globale ».

C’est le thème du prochain congrès annuel du Forum féministe le 7 mars Parlement européen.

La journée sera ouverte par Manon Aubry, et le débat du matin portera sur « la libération de la violence patriarcale ». Parmi les intervenantes (il n’y a évidemment aucun homme), je note la participation d’Alexandra Haché, « experte en genre et technologies ». Sic. Le débat de l’après-midi est intitulé « coût de la vie : combattre l’exploitation et la pauvreté féminine ». Ici je note la présence de « Sally Shortall, grande spécialiste universitaire internationale des questions de genre en milieu rural »…

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