https://www.lefigaro.fr/actualite-france/2018/12/04/01016-20181204ARTFIG00293-prostitution-sur-les-reseaux-sociaux-l-uberisation-de-l-exploitation-des-mineurs.php

 

Tablettes et autres objets connectés ont largement facilité la multiplication de ces «conduites prostitutionnelles», s'alarme l'association Agir contre la prostitution des enfants. 90053098/nito - stock.adobe.com

 

Selon les associations, entre 6000 et 10.000 mineurs se prostitueraient en France.

Des «camgirls» qui envoient des vidéos intimes en échange de cadeaux. Des «loverboys» qui prostituent leur petite amie ou qui partagent des photos osées. Des proxénètes qui recrutent sur les réseaux sociaux avec le mot-clef #argentfacile. Des «chatrooms» qui organisent des rencontres en trois clics… Depuis le recrutement des jeunes proies jusqu'à la mise en relation avec les clients, en passant par les pressions sur les victimes, smartphones, tablettes et autres objets connectés ont largement facilité la multiplication de ces «conduites prostitutionnelles», s'alarme l'association Agir contre la prostitution des enfants (ACPE). C'est aussi ce qui a frappé le député LaREM d'Ille-et-Vilaine Mustapha Laabid, qui présentera en mars sa proposition de loi «visant à traiter de manière spécifique la prostitution des mineurs».

 

Aucune étude nationale n'a jamais chiffré le fléau. Mais ils seraient entre 6000 et 10.000 mineurs, selon le mouvement du Nid, à se prostituer en France. «Beaucoup en Île-de-France, précise Hélène Bidard, adjointe à la maire de Paris chargée de l'égalité femmes-hommes. On constate une pluralité des modes de prostitution, qui deviennent de plus en plus fluides, donc de plus en plus difficiles à repérer et qui donnent l'impression d'une espèce d'“ubérisation”de l'exploitation sexuelle des enfants. Avec un âge moyen d'entrée dans la prostitution de 14 ans!»

Et «des petits proxénètes à peine plus âgés que leurs victimes», soupire Armelle Le Bigot-Macaux, présidente de l'ACPE. «L'augmentation observée du nombre de mineurs adoptant ces conduites peut s'expliquer notamment par la généralisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication, souligne le rapport 2018 de l'association sur l'Exploitation sexuelle des mineurs en France. Les outils numériques donnent aux adolescents une illusion de virtuel et peuvent laisser croire que leurs actes n'ont pas de conséquences sérieuses.»

« Alors qu'auparavant le retour au domicile familial ou au foyer ou les mesures d'éloignement entraînaient la coupure avec les influences ­néfastes, le fait que les victimes possèdent désormais un smartphone les rend toujours aussi vulnérables à l'emprise »

Arthur Melon, secrétaire général de l'ACPE,

Il y a dix ans, «ces filles avaient 14-15 ans, aujourd'hui, c'est 10-11 ans: le phénomène monte en puissance dès la sixième!, raconte Katia Baudry, éducatrice en Seine-Saint-Denis. Connectées 24 heures sur 24, elles regardent du porno, des clips de rap, des émissions de télé-réalité et pensent que c'est la réalité. Elles ont compris qu'avec leur capital beauté elles peuvent réussir tout de suite, plus vite qu'avec leur capital scolaire…» Sur Coco.fr, par exemple, un «site de chat simple et rapide», il suffit de s'inscrire avec un pseudo et d'indiquer que l'on est majeure pour recevoir instantanément des dizaines de propositions salaces. Quand on avoue que l'on a «que 14 ans et demi», certains répondent «pas grave!». Un «Sugar Daddy» de 37 ans propose «sortie, ciné, shopping, sexe», pour «un budget de 500 à 1000 euros par mois». Et quand on lui précise ne pas avoir beaucoup d'expérience, il n'hésite pas: «Sympa! Tu apprendras avec moi», agrémenté d'un smiley.

«Le phénomène est extrêmement évanescent, confirme Barthélemy Hennuyer, substitut du procureur au TGI de Paris. Il y a un “proxénétisme de cités”, avec des victimes exploitées sur des périodes assez courtes, dans différents Airbnb, donc il faut obtenir des éléments très vite, procéder à des géolocalisations en temps réel. Avec la multiplicité des réseaux sociaux, c'est compliqué. Sur Snapchat, par exemple, les messages s'effacent après avoir été lus…»«On a toujours un temps de retard!», renchérit un éducateur. En outre, souligne Arthur Melon, secrétaire général de l'ACPE, «alors qu'auparavant le retour au domicile familial ou au foyer ou les mesures d'éloignement entraînaient la coupure avec les influences néfastes, le fait que les victimes possèdent désormais un smartphone les rend toujours aussi vulnérables à l'emprise».

À Rennes, ce sont des «mamans de filles de 13 ou 14 ans» qui ont alerté Mustapha Laabid. «Sur le volet législatif, plusieurs failles sont à déplorer, en particulier dans le cadre du proxénétisme en ligne», indique le député. Outre des sanctions plus importantes pour les proxénètes comme pour les clients des prostitués mineurs, sa proposition de loi vise les hébergeurs des annonces: «Aller vers une présomption de responsabilité, insiste-t-il, faciliterait la fermeture des sites Internet où prolifère de plus en plus la prostitution des mineurs.»

Sujets

 

.________________________________________________________________

 

Être «camgirl» ou «camboy» ne relève pas de la prostitution, selon la Cour de cassation

.

.https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/etre-camgirl-ou-camboy-ne-releve-pas-de-la-prostitution-selon-la-cour-de-cassation-20220519

.

.

.

.

.