https://fr.wikipedia.org/wiki/Lexique_de_Martin_Heidegger

 

..................

Absence

Heidegger note que, dans l'antiquité grecque, ce que l'on appelle le « présent » relève d'une conception bien plus large que la nôtre, qu'elle recouvre aussi bien l'« absence » de ce qui est passé, l'« absence » de ce qui est à venir mais aussi de ce qui est en retrait ; d'où l'idée de scinder en deux parts le concept archaïque, le « présent » proprement dit correspondant à notre idée et, plus ample, la « Présence » (avec un grand « P ») qui couvre les autres modes de la présence, qui tous trois sont présents à travers leur absence même, sans quoi ils seraient inexistants; c'est la notion allemande d'Anwesen ou, en français, l'« entrée en présence ». Notre présent n'est plus dans cette conception qu'un « séjour transitoire » ajointé, bordé entre deux types d'absence. Nous percevons ici la véritable dimension de l'être chez les Grecs anciens, qui se déploie aussi bien dans l'absence que dans la présence3.

L'absence est un mode d'être fondamental dans la philosophie de Martin Heidegger, il n'est que de se référer à l'expérience de l'absence dans ses développements sur les « dieux enfuis ». Comme l'écrit Michel Dion4 « c'est justement cette absence des dieux (enfuis) qui, au-delà de la mort nietzschéenne de Dieu, conduit à l'expérience du sacré [...] Les dieux enfuis sont ainsi absence et présence de leur absence ; ils préparent la nouvelle venue de Dieu, le « Dieu à venir » ».

......

Accomplissement

De l'allemand Das Vollbringen. Par ailleurs, l'allemand Vollzugssinn est traduit par « sens d'accomplissement ».

Accomplir, c'est arriver à dire l'être des choses, ou porter l'être de la chose à sa plénitude, comme il est précisé dans la première page de la Lettre sur l'humanisme5. Le « sens d'accomplissement » est un moment fondamental du comportement humain, qui recouvre aussi bien les processus de constitution que l'appropriation des phénomènes dans et pour chaque situation concrète. Avec le sens d'accomplissement c'est la vie elle-même qui apparaît dans sa « facticité »6.

L'« accomplissement » est un moment de l'entente phénoménologique approfondie de la vie, par elle-même. Cette entente met à jour trois dimensions que Heidegger désigne successivement comme le Gehaltsinn (teneur de sens, ou horizon, tout « vécu » est un événement ayant une signification dans un « monde » donné de significations, tel ou tel monde religieux ou le monde de la passion amoureuse), le Bezugssinn (référentiel ou intentionnalité) et le Vollzugssinn (accomplissement ou remplissement, prise de possession). Ce ternaire fondamental, amplement décrit par Jean Greisch7, est évoqué dans de multiples analyses de la phénoménologie de la vie. Tout comportement, tout phénomène de vie n'est pas vraiment compris tant qu'il n'est pas envisagé sous l'angle de son troisième moment à savoir, l'accomplissement (Vollzugssinn), que l'on traduit indifféremment par « effectuation » ou « remplissement ».

« La nature de cet accomplissement de la vie et la possibilité méthodologique d'y accéder et d'en parler, voilà l'un des enjeux cruciaux des réflexions du jeune Heidegger »8. Elle se rapporte donc intrinsèquement au « monde », ce qui veut dire qu'elle a pour « teneur de sens » (Gehaltsinn) le monde de la vie9. Pour Heidegger la vie s'accomplit toujours « dans », « vers » , ou « contre » quelque chose , elle se rapporte strictement au monde10.

Dans le vécu du monde ambiant (Gehaltsinn, teneur de sens ou horizon), il se donne (au sens de donation quelque chose Bezugssinn (sens référentiel) en rapport avec ce monde. Comme le note Jean Greisch11, la vie est « toujours déjà en train de s'investir dans des projets déterminés à lui procurer les assurances dont elle a besoin ».(Heidegger dit dans une formule célèbre : « cela mondanise »12). Vivre c'est se soucier, le monde en devient signifiant car la signifiance des choses n'est pas l'œuvre de la logique, elle n'apparaît que par et à la lumière du « Souci »10. Heidegger précise qu'il ne suffit pas de disposer du sens référentiel (par exemple, le contenu d'une prière bouddhiste) pour en comprendre la juste portée car, et ceci est surtout vrai, dans les mondes esthétiques et religieux, ce sens tend à se retirer dans l'occultation pour se réserver à ceux qui l'« accomplissent » (les seuls croyants), c'est le Vollzugssinn13.

 

.................

 

...................

Dernier dieu

De l'allemand : Der Letzte Gott

L'expression « dernier dieu » , qui n'est ni le dieu de la théologie, ni celui de la métaphysique, apparaît dans la sixième « Fuge » (articulation), des Apports à la philosophie : De l'avenance. Parce qu'il ne s'agit pas de penser le dieu en termes de dernier d'une longue série François Fédier préfère l'expression de « Dieu à l'extrême » par laquelle est traduit le titre de la sixième fugue. Ce Dieu , autrement divin que les dieux jusqu'ici dieux connus . « Le dieu à l'extrême découvre l’être à lui-même en son fondement abyssal » écrit Sylvaine Gourdain86.

C'est dans la Lettre sur l'humanisme87, qu'interviennent pour la première fois, comme médiateurs, le divin et les dieux. On reverra ces derniers, comme quatrième partenaire, sous l'appellation de sacré ou d'immortels dans De l'origine de l'œuvre d'art88, accompagnant les hommes, le ciel et la terre, dans une configuration « quadripartite » de l'être qui devient, à partir de ce moment, l'intuition fondamentale de Heidegger89. Ces dieux qui pourtant ne nous apparaissent plus que comme traces, vestiges ou mémoires deviennent sous l'influence d'Hölderlin indispensables à l'équilibre du tout (voir en ligne Sylvaine Gourdain90.

Pour Sylvaine Gourdain91, « le dernier dieu incarne la positivité la plus grande du « retrait » : il est le « commencement » qui se dérobe toujours, et en cela même, il indique la possibilité d'une ouverture au-delà du contexte étroit et étriqué de l'époque de l'illusoire gigantesque [...] il ne se range pas dans les cadres du mode de dévoilement à l'époque de la « Machenschaft » [...]. Le dernier dieu renvoyant à l'infinité des possibilités [...] montre que la vérité de l'être est ouverture si radicale au possible qu'elle en devient quelque chose d'impossible [...] elle n'advient, qu'en créant elle-même sa possibilité »

......................

......................

..................

Appropriation

De l'allemand : Ereignen

Ereignen, est un des termes majeur mais difficilement traduisible du lexique heideggerien, d'où découle le concept fondamental dans sa pensée de l'Ereignis.

Appropriation signifie d'abord prendre appui sur (das Eigene) « comme mouvement d'amener une chose à son propre ». Nous ne sommes pas dans le registre notarial de la « propriété », mais plutôt dans celui de l'expression française « remettre en main propre ». À travers le terme « approprier », il ne faut pas entendre qu'une chose devienne la propriété ou la possession, mais le fait d'« amener quelque chose à être ce qu'elle est ou la mener à son terme »27.

Appropriation qualifie aussi le « demeurer ensemble ». À propos de l'exemple de l'être de la cruche tiré de la « conférence sur la Chose », Didier Franck28 conclut : « le ciel et la terre, les divins et les mortels sont appropriés ou s'approprient réciproquement dans la mesure où aucun d'entre eux ne va sans les autres, dans la mesure où, pour parler de manière grecque, chacun reçoit son « être » de celui des autres auxquels il est ainsi (confié) ». Dans les Beiträge zur Philosophie (Vom Ereignis), il est à plusieurs reprises parlé à propos de l'Ereignis d'« événement appropriant ». « Hedegger nomme « événement appropriant » la réciprocité entre le besoin de l'Être et l'appartenance du Dasein à l'Être. C'est cette échange réciproque qui est censé opérer le Tournant dans l'événement appropriant »29.

Plus profondément « Appropriation » qualifie l'Ereignis en ce qu'il « conduit l’homme à ce qui lui est propre (ereignen) en le plaçant dans un rapport – celui par exemple qui prévaut de la pensée comme essence de l’homme, et de l’être de l’étant – que l’on peut proprement qualifier d’abyssal, dans la mesure où aucun de ses termes ne lui préexiste, mais où chacun se définit comme relation à l’autre », écrit Julien Pieron30.

 ................

..........

 

Appropriation

De l'allemand : Ereignen

Ereignen, est un des termes majeur mais difficilement traduisible du lexique heideggerien, d'où découle le concept fondamental dans sa pensée de l'Ereignis.

Appropriation signifie d'abord prendre appui sur (das Eigene) « comme mouvement d'amener une chose à son propre ». Nous ne sommes pas dans le registre notarial de la « propriété », mais plutôt dans celui de l'expression française « remettre en main propre ». À travers le terme « approprier », il ne faut pas entendre qu'une chose devienne la propriété ou la possession, mais le fait d'« amener quelque chose à être ce qu'elle est ou la mener à son terme »27.

Appropriation qualifie aussi le « demeurer ensemble ». À propos de l'exemple de l'être de la cruche tiré de la « conférence sur la Chose », Didier Franck28 conclut : « le ciel et la terre, les divins et les mortels sont appropriés ou s'approprient réciproquement dans la mesure où aucun d'entre eux ne va sans les autres, dans la mesure où, pour parler de manière grecque, chacun reçoit son « être » de celui des autres auxquels il est ainsi (confié) ». Dans les Beiträge zur Philosophie (Vom Ereignis), il est à plusieurs reprises parlé à propos de l'Ereignis d'« événement appropriant ». « Hedegger nomme « événement appropriant » la réciprocité entre le besoin de l'Être et l'appartenance du Dasein à l'Être. C'est cette échange réciproque qui est censé opérer le Tournant dans l'événement appropriant »29.

Plus profondément « Appropriation » qualifie l'Ereignis en ce qu'il « conduit l’homme à ce qui lui est propre (ereignen) en le plaçant dans un rapport – celui par exemple qui prévaut de la pensée comme essence de l’homme, et de l’être de l’étant – que l’on peut proprement qualifier d’abyssal, dans la mesure où aucun de ses termes ne lui préexiste, mais où chacun se définit comme relation à l’autre », écrit Julien Pieron30.

 .....................

......................

................

Dernier dieu

De l'allemand : Der Letzte Gott

L'expression « dernier dieu » , qui n'est ni le dieu de la théologie, ni celui de la métaphysique, apparaît dans la sixième « Fuge » (articulation), des Apports à la philosophie : De l'avenance. Parce qu'il ne s'agit pas de penser le dieu en termes de dernier d'une longue série François Fédier préfère l'expression de « Dieu à l'extrême » par laquelle est traduit le titre de la sixième fugue. Ce Dieu , autrement divin que les dieux jusqu'ici dieux connus . « Le dieu à l'extrême découvre l’être à lui-même en son fondement abyssal » écrit Sylvaine Gourdain86.

C'est dans la Lettre sur l'humanisme87, qu'interviennent pour la première fois, comme médiateurs, le divin et les dieux. On reverra ces derniers, comme quatrième partenaire, sous l'appellation de sacré ou d'immortels dans De l'origine de l'œuvre d'art88, accompagnant les hommes, le ciel et la terre, dans une configuration « quadripartite » de l'être qui devient, à partir de ce moment, l'intuition fondamentale de Heidegger89. Ces dieux qui pourtant ne nous apparaissent plus que comme traces, vestiges ou mémoires deviennent sous l'influence d'Hölderlin indispensables à l'équilibre du tout (voir en ligne Sylvaine Gourdain90.

Pour Sylvaine Gourdain91, « le dernier dieu incarne la positivité la plus grande du « retrait » : il est le « commencement » qui se dérobe toujours, et en cela même, il indique la possibilité d'une ouverture au-delà du contexte étroit et étriqué de l'époque de l'illusoire gigantesque [...] il ne se range pas dans les cadres du mode de dévoilement à l'époque de la « Machenschaft » [...]. Le dernier dieu renvoyant à l'infinité des possibilités [...] montre que la vérité de l'être est ouverture si radicale au possible qu'elle en devient quelque chose d'impossible [...] elle n'advient, qu'en créant elle-même sa possibilité »

 

......................

Destin

De l'allemand : das Geschick ou das Schicksal

Chez Heidegger, il faut d'abord écarter l'idée de fatalité. Le destin apparaît dans Être et Temps, là où il est question de l'historialité, c'est-à-dire le fait pour l'étant que nous sommes à « avoir à être ». L'idée c'est que pour que puisse s'ouvrir pour nous un avenir véritable il faut bien que nous nous exposions . Le Dasein « résolu » , libre vis-à-vis de sa mort « s'en remet à soi-même en embrassant une possibilité dont il est l'héritier, mais que cependant il choisit parce qu'il a la capacité qui permet de faire face à ce qui vient à notre encontre » écrit François Fédier102.

Heidegger écrit103 : « Le destin est par essence destin de l'être, au sens où l'être se destine lui-même, déploie à chaque fois son essence comme un destin et par là se métamorphose destinalement ». L'Être s'est destiné de nos jours comme essence de la Technique dans le Gestell. Heidegger précise sa conception : « se destiner (sich schicken), signifie se mettre en route, pour s'ajointer à la directive indiquée et qu'attend un autre destin voilé »103.

Dévoilement

Dans la pensée d'Heidegger , le dévoilement désigne le processus par lequel se donne à voir la vérité. Heidegger déplace la question de la vérité du champ logique et métaphysique au champ ontologique. Devient

 

 

............

 

Éclaircie

De l'allemand : Lichtung.

Terme référé tout d'abord à la lumière dans Être et Temps, et plus précisément compris comme clairière, Waldlichtung, éclaircie, allégie119 : ce qui est ouvert. En tant qu'« être-au-monde », le Dasein est l'éclairé qui éclaire, « il est lui-même la clairière »(SZ p. 133). En 1965, à l'occasion de la conférence parue en français sous l'intitulé L'affaire de la pensée, Heidegger met de côté cette référence à la lumière et interprète dorénavant la Lichtung selon son deuxième sens allemand, à savoir « lieu où se libère, où s'affranchit » (Lichtung ne viendrait ainsi pas de Licht « lumière », mais de leicht , du verbe lichten, alléger, dégager, libérer, allégir), la Lichtung n'éclaire pas seulement, « elle octroie la présence-même »120.

« Dans la Lichtung s'ouvre cette amplitude sans laquelle les choses ne peuvent justement pas entrer en rapport et se tenir dans une mutuelle proximité ; sans laquelle le lointain lui-même ne peut surgir comme tel »121. François Fédier23, précise « Lichtung doit s'entendre comme un mot qui désigne un mouvement où quelque chose s'accomplit. Die Lichtung n'est pas un lieu [...] quelque chose a lieu quelque chose qui libère »

« Tout ce qui paraît vient à la lumière mais il n'y a pas de lumière sans ombre, l'une et l'autre ne peuvent entrer en contraste qu'au sein d'une dimension préalable qui les ouvre l'une à l'autre. Nous nommons cette ouverture qui octroie un possible laisser-paraître et montrer l'éclaircie, dit Heidegger en précisant peu après que la lumière peut bien pénétrer dans l'éclaircie [...], mais en aucun cas la lumière ne crée d'abord l'éclaircie. Au-delà des rayons et des ombres, l'éclaircie est l'ouvert pour tout ce qui « vient-en-présence », pour tout ce qui « s'absente » » écrit Didier Franck122

 

..................